Visite surprise de la sénatrice Esther Benbassa au centre de rétention de Roissy

 Visite surprise de la sénatrice Esther Benbassa au centre de rétention de Roissy

La France fait l’objet de nombreuses critiques et plaintes sur les conditions dans les centres de rétention. Joel Saget/AFP

La sénatrice EELV Esther Benbassa a dénoncé les conditions de rétention des étrangers lors d’une visite surprise, mardi au Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne). Ce centre de rétention administrative (CRA), le plus grand de France, a connu un important incendie en janvier.

 

« Bonjour ! Je suis sénatrice et je viens visiter le centre », a annoncé Mme Benbassa à l’interphone, avant d’entrer dans le centre de rétention administrative. Le CRA du Mesnil-Amelot est situé à seulement quelques centaines de mètres des pistes de l’aéroport de Roissy, principale frontière française.

« Ces centres de rétention ne devraient pas exister, il y a des barreaux partout », a fustigé la sénatrice de Paris. Ce ne « sont pas des gens qui ont commis un délit ou un crime », rappelle-t-elle. Ajoutant « souvent, ils ne savent pas pourquoi ils sont là ». L’élue a ainsi eu l’occasion de s’entretenir avec plusieurs des étrangers enfermés.

Une cinquantaine de personnes sont actuellement retenues au Mesnil-Amelot, dont 14 femmes, a indiqué François Mercier, le nouveau directeur interdépartemental de la police aux frontières du CRA. Pris de court par la visite de la sénatrice, il a tout de même accepté l’entrée de la délégation, composée notamment de sept journalistes.

Maintenu en rétention malgré une expulsion annulée

Le 20 janvier, dans ce CRA de Seine-et-Marne, des étrangers avaient déclenché un incendie. Ils protestaient contre une décision de justice les maintenant en rétention, car ils avaient refusé un test PCR, nécessaire à leur expulsion. Depuis quelques mois, de nombreux migrants refusent le dépistage du nouveau coronavirus afin d’échapper à l’expulsion.

« Quand on met le feu, ce que je n’approuve absolument pas, c’est qu’il y a un ras-le-bol », a estimé Mme Benbassa. Elle dénonce « des aberrations dans les décisions de justice » qui conduisent des étrangers en rétention.

À lire aussi : Une personne détenue en CRA pendant 56 jours arbitrairement

Un ressortissant algérien est ainsi retenu au Mesnil-Amelot pour la troisième fois alors que sa procédure d’expulsion avait été annulée en justice, selon la Cimade. L’association de soutien aux migrants et réfugiés dispose d’une antenne sur place et est l’une des principales sources d’information sur les conditions de rétention. C’est « dur, je tiens avec des médicaments », a-t-il déclaré à l’AFP. Cet Algérien de 40 ans vit à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) depuis cinq ans.

« Les gens ne comprennent pas l’enfermement », explique Julia Labrosse, intervenante juridique. Il « n’y a pas de vol (d’avions du fait de la pandémie, NDLR) donc pas d’expulsion. Il y a des tensions et des retenus dénoncent des violences policières », ajoute-t-elle. En 2020, le nombre d’expulsions d’étrangers en situation irrégulière a chuté de 51 % sous l’effet des restrictions liées à la pandémie.

À lire aussi : Des sénateurs « épouvantés » par leur visite en centre de rétention

Ce n’est pas la première fois que des parlementaires dénoncent les conditions de rétention des étrangers. En 2019, plusieurs élus socialistes et écologistes, dont Mme Benbassa, ont été scandalisés lors de leurs visites au même CRA du Mesnil-Amelot.

La France régulièrement condamnée

Outre les accusations de violences, la France fait l’objet de nombreuses critiques et plaintes sur sa gestion des personnes en situation irrégulière. Délais de rétention dépassés, enfermement systématique d’enfant ou encore mauvaises conditions de vie dans les CRA, les griefs sont nombreux.

À lire aussi : Immigration : bond spectaculaire de l’enfermement des enfants

En février 2019, un jeune Afghan de 12 ans a ainsi obtenu la condamnation de la France devant la Cour européenne des droits de l’Homme pour « traitement dégradant ». Au printemps de la même année, c’était le Défenseur des droits qui s’insurgeait contre les difficultés d’accès aux soins des personnes retenues.