Violences au Parlement : le président Saïed condamne et menace d’intervenir

 Violences au Parlement : le président Saïed condamne et menace d’intervenir

Recevant au Palais de Carthage une délégation de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), le président Kais Saïed a mis en garde contre « tout chantage à la violence », invoquant la nécessité de respecter la « légitimité des institutions » et des lois en vigueur.

 

Tout est parti d’une intervention le 4 décembre du député ultra conservateur Mohamed Affes (vidéo ci-dessus). A l’ordre du jour, la discussion, dans le cadre de la loi de finances 2021, du budget alloué au ministère de la Femme, de la famille et de l’enfance. L’élu se lance alors dans une longue tirade, sous forme de diatribe à charge contre ce qu’il appelle « les acquis fallacieux de la femme tunisienne », qu’il impute au féminisme d’Etat pratiqué depuis l’ère bourguibiste.

 

Résurgence du débat identitaire et idéologique

Tollé dans l’hémicycle où nombre de députés quittent l’enceinte du Parlement, dénonçant « un discours profondément sexiste et misogyne ».

Particulièrement toxique et clivant, le débat intervient sur fond d’une campagne médiatique orchestrée pat une star locale des sitcoms et de la chanson, Aïcha Attia, en faveur d’une réhabilitation morale et sociale des mères célibataires. L’actrice avait ainsi simulé une grossesse sur les réseaux sociaux, tentant de sensibiliser sur le sujet tabou du sort des enfants nés hors mariage.

Dans son intervention, Affes s’est saisi de l’opportunité de la venue de la ministre pour qualifier les mères célibataires de « femmes de petite vertu, quand elles n’ont pas été violées ». Sa prise de parole controversée provoque des manifestations quotidiennes aux abords du Parlement, avec en pointe l’Association tunisiennes des femmes démocrates dont des militantes ont tenté ce matin mardi de forcer l’entrée de l’Assemblée.

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Point d’orgue de ces 72 heures de heurts, alors que le pays est plongé dans une crise économique sans précédent, l’altercation physique qui a opposé hier lundi des députés de la Coalition de la dignité, à laquelle appartient Mohamed Affes, à d’autres députés de divers groupes parlementaires. Visage tuméfié et ensanglanté d’un élu, évanouissements et pleurs d’autres élues, les images choquent l’opinion. Des voix s’élèvent alors pour dissoudre une Assemblée qui s’éloigne chaque jour un peu plus des préoccupations des Tunisiens.

 

 

Saïed dans son rôle constitutionnel de président garant de la pérennité des institutions

Face à ces hôtes, précisément les députés agressés dans la même journée de lundi, le président de la République Kais Saïed a dit rejeter lundi soir toute forme de violence « tout particulièrement au sein des institutions de l’Etat ».

Sur le ton grave et solennel, mais aussi quelque peu conspirationniste que l’on lui connaît, le chef de l’Etat a promis de faire face, « via tous les moyens juridiques requis, à toute tentative de déstabiliser l’Etat ».

Ainsi l’accent fut mis au cours de cette rencontre sur la nécessité de faire passer la loi de finances de sorte d’éviter le recours à l’article 66 de la Constitution, qui implique la gestion du budget de l’Etat par décrets présidentiels en dernier recours.

Dans son chapitre IV consacré au pouvoir exécutif, la Constitution tunisienne stipule dans son article, section première, que « le président de la République est le chef de l’État et le symbole de son unité. Il garantit son indépendance et sa continuité, et veille au respect de la Constitution ».