Urgent. Tunisie : La Banque mondiale réagit à la polémique sur les subsahariens

 Urgent. Tunisie : La Banque mondiale réagit à la polémique sur les subsahariens

David Malpass est à la tête de la Banque mondiale depuis avril 2019. Président sortant, il a annoncé son départ prévu pour le 30 juin prochain

La Banque mondiale a annoncé lundi soir la suspension « jusqu’à nouvel ordre » de son cadre de partenariat avec la Tunisie en raison des agressions contre des ressortissants subsahariens depuis les propos virulents du président Kais Saïed les concernant. L’information confirmée par l’agence Reuters, citant une note interne de la Banque mondiale.

En partie démentie par certains médias nationaux, l’information provient d’un courrier adressé par le président de la Banque mondiale en personne, David Malpass, à ses équipes. Une note interne que nous avons pu consulter dans la nuit de lundi à mardi 7 mars.

Il y a une semaine, les autorités tunisiennes se prévalaient du déblocage prochain de fonds provenant de la Banque mondiale, en guise de bouée de sauvetage alternative après le report sine die des pourparlers avec le FMI. Mais coup de théâtre, la BM dit désormais ne plus être en mesure de poursuivre ses missions sur place « compte tenu de la situation », « l’inclusion des migrants et minorités faisant partie des valeurs centrales d’inclusion, de respect et d’anti-racisme » de la Banque mondiale, peut-on lire dans le texte de l’institution financière de Washington, D.C.

 

Un isolement international grandissant

Plus précisément, la décision concerne le cadre de partenariat pays (CPF en anglais), qui sert de base de suivi par le conseil d’administration de la BM afin d’évaluer et accompagner le pays dans ses programmes d’aide. En clair, l’institution ne peut plus lancer de nouveau programme de soutien avec le pays tant que le CA ne s’est pas réuni et elle a décidé de remettre cette réunion sur la Tunisie selon la note.

« Les projets financés restent financés et les projets en cours restent en cours », a-t-on néanmoins précisé de source proche de la BM. La Banque prévient cependant d’un possible ralentissement de ses actions sur place à cause de la mise en place de mesures de sécurité, en particulier auprès de ses personnels originaires d’Afrique subsaharienne et de leurs familles. Une information catastrophique de plus pour l’image du pays, pour l’économiste Ezzedine Saïdane.

« La Tunisie a une longue tradition d’ouverture et de tolérance qui est encouragée par tant de personnes dans le pays », a insisté de façon diplomatique David Malpass dans son courrier aux employés de la BM. « Si les mesures prises par le gouvernement tunisien afin de protéger et soutenir les migrants et réfugiés dans cette situation très difficile vont dans le bon sens », la BM assure qu’elle « évaluera et surveillera attentivement leur impact ».

Rappelons que le président tunisien Kaïs Saïed avait estimé fin février que « des mesures urgentes » étaient nécessaires « contre l’immigration clandestine de ressortissants de l’Afrique subsaharienne », évoquant notamment des « hordes de migrants clandestins » dont la venue relevait d’une « entreprise criminelle ourdie à l’orée de ce siècle pour changer la composition démographique de la Tunisie ».

Des propos vivement critiqués par des ONG et des militants des droits humains. Ils ont également semé un vent de panique parmi les migrants subsahariens qui font état depuis d’une recrudescence des agressions les visant et se sont précipités par dizaines à leurs ambassades pour être rapatriés.

 

Dimanche, la présidence de la République tunisienne a tenté un rétropédalage, sans formuler d’excuses, dans un communiqué annonçant quelques mesures d’une part pour faciliter le départ et le rapatriement des migrants subsahariens et par ailleurs d’autres mesures en faveur du cadre du séjour de ceux parmi eux qui souhaitent rester. « Trop peu trop tard » pour les détracteurs du président qui dénoncent une gestion désastreuse qui fait du pays « un Etat non grata » sur la scène internationale.