Une marche ce dimanche contre tous les racismes et la défense des enfants
La date du 21 avril pour la tenue de la marche parisienne, -de Barbès à République-, contre le racisme, l’islamophobie et pour la protection de tous les enfants, n’a pas été choisie par hasard. Elle correspond à la date anniversaire de la mort d’Amine Bentounsi. Ce jeune homme, âgé de 28 ans à l’époque des faits, recherché par la police pour ne pas être rentré de permission, avait été abattu d’une balle dans le dos le 21 avril 2012 à Noisy-Le-Sec (93) par Damien Saboundjian, un gardien de la paix.
En 2017, la cour d’appel de Paris n’avait pas retenu la légitime défense et l’avait condamné à cinq ans de prison avec sursis. Une victoire arrachée grâce au combat mené par sa sœur Amal Bentounsi.
C’est elle qui est aujourd’hui une des initiatrices de la marche du 21 avril, avec Yessa Belkhodja, militante décoloniale, membre du collectif de défense des jeunes du Mantois (Mantes-la-Jolie, Yvelines).
« Avant d’être tué par la police, mon frère a été le plus jeune prisonnier de France », témoigne auprès du Courrier de L’Atlas Amal Bentounsi. Mantes-la-Jolie, c’est justement dans cette ville qu’en décembre dernier, les deux amies ont eu l’idée d’organiser cette marche.
« On voulait monter une conférence sur ce qu’il s’était passé il y a quelques années à Mantes-la-Jolie quand les lycéens avaient été humiliés par la police, explique Amal Bentounsi, mais malheureusement cela n’a pas été possible alors on a pensé à organiser cette grande marche contre le racisme, l’islamophobie et pour la protection de tous les enfants. Lier les trois nous semblait évident ».
Le 6 décembre 2018, après trois jours de heurts en marge du mouvement de protestation lycéen, 151 jeunes, âgés de 12 à 21 ans, avaient été mis à genoux, tête baissée, mains sur la tête, tenus en respect par des policiers avant d’être dispatchés dans des commissariats.
La marche dimanche prochain, qui intervient alors qu’ont été célébrés il y a quelques mois, les 40 ans de la Marche pour l’Egalité et contre le racisme, a d’abord pour but, affirment les organisatrices, « de redonner espoir à celles et ceux qui seraient tentés par le fatalisme ». « Nous sommes conscients que la période est compliquée mais c’est en se mobilisant tous et en étant unis pour défendre la justice que les choses s’amélioreront », scande déterminée Amal Bentounsi.
La marche du 21 avril 2024 est également destinée à rendre hommage à « tous les jeunes victimes de crimes policiers, judiciaires et carcéraux ».
« Le 13 mars 2024, à Aubervilliers, Wanys et Ibrahim ont été volontairement percutés par la police après un prétendu refus d’obtempérer. Wanys est mort quelques heures après. Les 9 et 10 décembre 2023, à Chelles, deux adolescents, Théodor et Justin, trouvaient la mort pour refus d’obtempérer. Le 30 Novembre 2023, c’était au tour de Mustapha, mineur isolé marocain de se suicider par pendaison à la maison d’arrêt de Villepinte, énumère exaspérée Amal Bentounsi. Et il y a encore malheureusement d’autres cas », se désole-t-elle.
Autre motif d’inquiétude pour les organisatrices : la « montée de l’islamophobie ». Amal Bentounsi regrette que « depuis trop longtemps maintenant, des lycéennes sont stigmatisées et harcelées parce que musulmanes en apparence. Des associations ont été dissoutes alors qu’elles aidaient les femmes musulmanes », peste encore la militante.
Les deux militantes aimeraient que les institutions cessent d’être dans le déni. « Pour moi, c’est indéniable : il y a un racisme systémique en France », insiste Amal Bentounsi. « Les immigrés sont décriés comme des ennemis de l’intérieur par certains politiques, dénonce-t-elle encore. Le problème ce ne sont pas les immigrés, c’est le chômage et la pauvreté. Et puis, après six générations de présence en France, nous ne sommes plus des immigrés », raille Amal Bentounsi.
La militante insiste aussi sur le fait que cette marche n’est pas organisée pour « s’apitoyer sur son sort ». « Nous voulons juste tirer la sonnette d’alarme », affirme-t-elle. Pour elle, c’est aussi un espoir « d’unification ». Elle regrette que « chacun soit de son côté à défendre sa cause ».
Et de citer une phrase du psychiatre et militant anticolonialiste Frantz Fanon : « Quand vous entendez dire du mal des Juifs, dressez l’oreille, on parle de vous ». « Aujourd’hui, on pourrait dire la même chose avec les musulmans », conclut Amal Bentounsi qui espère que « peu importe nos origines, nous marcherons à Paris tous ensemble ».
Marche contre le racisme, l’islamophobie et pour la protection de tous les enfants, 21 avril 2024, à 14h, Barbès-République.