Un navire avec 40 naufragés à bord bloqué en Méditerranée

 Un navire avec 40 naufragés à bord bloqué en Méditerranée

Le Sarost 5 est immobilisé face au port de Zarzis avec 40 naufragés à bord en attente du feu vert des autorités pour débarquer


Plusieurs ONG font part dans un communiqué de leur indignation devant le refus de la Tunisie d’accueillir les 40 rescapés, secourus en mer après avoir passé cinq jours à la dérive. Le navire qui les a recueillis à son bord est immobilisé depuis le 16 juillet en rade de Zarzis (sud) dans l’attente du feu vert des autorités pour l’accueil de ces personnes, dont plusieurs en état de choc, expliquent des sources associatives.


Il y a près d’une semaine, une plateforme offshore située dans les eaux internationales au large des iles tunisiennes de Kerkennah a averti le Centre de contrôle des secours en mer (MRCC) de Malte de la présence d’une embarcation en détresse. La Valette a réagi en dépêchant le navire le plus proche, comme le prévoit le droit maritime international, en l’occurrence le Caroline Tide III. Ce navire utilitaire leur porte secours, mais n’a pas la capacité de prendre en charge la quarantaine de personnes, dont des femmes enceintes.


Le Caroline III a alors appelé les centres de secours (MRCC) de l’Italie, de la France et de Malte qui ont refusé d’accueillir ces rescapés prétextant que les ports les plus proches étaient situés en Tunisie. Sur autorisations des autorités tunisiennes compétentes, un autre navire, le Sarost 5, les prend à son bord alors qu’il assurait une mission d’approvisionnement pour la plateforme gazière, explique son capitaine cité par des ONG. Il reçoit dans un premier temps la consigne de se diriger vers le port tunisien de Sfax, avant d’être redirigé plus au sud vers Zarzis, où il attend l’autorisation de débarquer depuis deux jours.


Pour les autorités maltaises, il s’agit du « port sûr » le plus proche. Mais, les sources sont contradictoires quant à la position exacte du sauvetage et au pays qui doit accueillir ces personnes. Selon l’organisation Watch The Med-Alarmphone, spécialisée dans le suivi des navires en détresse, « les migrants originaires de plusieurs pays d’Afrique en quête de protection en Europe (ont été) transférés illégalement vers les eaux territoriales tunisiennes alors qu’ils avaient déjà atteint les eaux internationales et la zone SAR (Search and Rescue, NDLR) maltaise ».


 


Refoulement vers les côtes africaines


Les ONG signataires du communiqué, dont le Forum Tunisien pour les Droits Economiques et Sociaux et le Réseau Euromed Droits, estiment que la « Tunisie n’est pas à ce jour considéré comme un “pays sûr” », notamment en raison de « l’absence d’une loi régissant l’asile ou de garantie d’un examen ultérieur juste, équitable et individuel de la situation des rescapés ». Le texte rappelle aux gouvernements italiens, maltais et français « que tout renvoi du navire non dûment justifié revient à contrevenir au principe de non-refoulement des personnes à bord ».


Le refus italien et maltais de prendre en charge les naufragés fait suite à plusieurs refus similaires ces dernières semaines. Par ailleurs, cet incident survient alors qu’« une délégation belge est arrivée il y a deux jours à Tunis pour parler notamment des centres de débarquement (de migrants) » que l'Europe souhaite ouvrir au sud de la Méditerranée, indique une source associative proche du dossier.


Pour autant, « le refus que la Tunisie soit mise devant le fait accompli des nouveaux choix européens d’externaliser leurs frontières et d’ignorer les droits des migrants à l’accès à un pays sûr » ne doit pas se faire aux dépens de menaces effectives sur la vie des naufragés, ajoutent les signataires du communiqué. Ils appellent les « autorités tunisiennes (…) à se conformer urgemment aux obligations qui leur incombent au regard notamment de la Convention internationale relative à la sauvegarde de la vie humaine (SOLAS), de la Convention internationale relative à la recherche et au sauvetage maritime (SAR) et ses Protocoles, ainsi que la Convention de Montego Bay sur le droit de la mer », dont la Tunisie est signataire.


Rached Cherif


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