Un gouvernement du redressement économique ?
L’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a accordé tard dans la nuit de lundi à mardi la confiance aux nouveaux ministres et secrétaires d'Etat proposés par Youssef Chahed dans le cadre du dernier remaniement ministériel. Dans son allocution, le chef du gouvernement « de guerre » a annoncé qu’il se fixera quatre grands objectifs et autant de chantiers économiques.
Sans surprise, la nouvelle équipe gouvernementale a obtenu entre 153 voix pour les deux ministres les plus cotés, Ridha Chalghoum et Abdelkarim Zebidi, et respectivement 124 et 133 votes pour les deux secrétaires d’Etat les moins populaires : Sarah Rejeb et Adel Jarbouï. Ardent nostalgique de l’ère Ben Ali comme en attestent ses publications sur les réseaux sociaux, ce dernier a suscité des débats houleux dans les allées de l’ARP, pour finalement se voir voter assez confortablement la confiance du Parlement…
En guise de réponse aux nombreux députés d’opposition qui l’ont accusé de suivisme et d’effacement face à des décisions de remaniement « en réalité prises à Carthage et à Montplaisir », Youssef Chahed a fermement affirmé dans son discours final : « J'ai exercé mes prérogatives sans calculs politiques », sans nécessairement convaincre.
4 chantiers économiques et la possibilité pour les Tunisiens d’ouvrir des comptes en devises
La plénière en session extraordinaire fut par ailleurs pour Chahed l’occasion d’annoncer une batterie de mesures sous forme d’impulsion voire de virage de sa politique générale.
Appelés à entamer des réformes profondes et « structurelles » pour sortir de la crise, les nouveaux ministres seront « amenés à retrousser les manches pour mettre le pays sur les rails de la croissance », a déclaré le jeune chef du gouvernement, volontariste, en réponse à ses détracteurs qui critiquent « un gouvernement de la com’ ».
Pour Chahed, le programme de la nouvelle équipe gouvernementale s’articulera autour de quatre axes principaux : le contrôle de la masse salariale afin de s'établir à l’horizon 2020 à 12,5%, la réduction du déficit de la balance commerciale, le maintien d'un taux d'endettement stable inférieur à 70% et la promotion vers une croissance générale atteignant 5% en 2020.
Pour ce faire, la fonction publique ne pourra à titre d’exemple en cette année 2017 n’accepter en théorie qu’une cinquantaine de nouveaux recrutements. En clair, c’est une austérité qui se traduit par un gel pur et simple dans ce secteur. Une équation difficile, lorsque l’on sait qu’au même moment, le gouvernement entend réduire le taux de chômage de près de 3% dans les trois années à venir.
A ce sujet, Chahed affirme que des réformes ont été lancées telles que la maîtrise de la masse salariale à travers l'encouragement au départ volontaire à la retraite et l'éradication des recrutements anarchiques, le soutien aux caisses sociales, la restructuration des entreprises publiques et la réforme du système de subventions des matières premières.
Pragmatique, Chahed a enfin reconnu que les lois sur la détention de devises ne sont plus en accord avec la réalité de la situation en Tunisie, allusion au marché noir des devises qui prospère plus que jamais.
« Pour palier cela, le gouvernement proposera bientôt à l'ARP un projet de loi qui permettra aux Tunisiens d'ouvrir des comptes en devises et de régulariser la situation de leurs comptes à l'étranger », a-t-il annoncé.
S.S