Un déconfinement sous le signe de la prudence
C’est aujourd’hui 4 mai 2020 qu’un million et demi de Tunisiens reprennent le travail, une part de la population active qui vient s’ajouter à celle qui travaillait déjà avant le démarrage en ce lundi du déconfinement graduel. Un processus qui ne se fait pas sans écueils, déjà marqué par quelques cafouillages au sommet de l’Etat.
Tunis – 09h00 heure locale, station TGM, la vie reprend lentement en ce jour de ramadan où l’on ne se bouscule pas encore dans cette gare du centre-ville de la capitale : il y a presque autant de journalistes pour constater la reprise après un mois et demi de paralysie que de passagers du métro. Pourtant, les agents de la SNCFT ont du mal à faire respecter les nouvelles règles strictes de distanciation sociale, ce qui laisse présager d’un débordement d’autant plus important en « phase 2 », dans 20 jours.
La veille, stupeur chez certains en lisant dans une liste publiée dans le Journal officiel de la République tunisienne, qui y découvrent que parmi les catégories sociales concernées par le déconfinement, les mères d’enfants dont l’âge est inférieur ou égal à 15 ans. « Ce gouvernement pense que nous sommes au 19ème siècle », commente une internaute dont le tweet d’indignation est massivement relayé.
Est-ce l’effet de la cohabitation en vigueur entre socio-démocrates et Ennahdha ?
« Une erreur s’est glissée dans la version finale du décret gouvernemental fixant les modalités du confinement ciblé paru dans le dernier Jort, contrairement à ce qui a été convenu lors du conseil des ministres », s’est en tout cas rapidement rattrapé le gouvernement Fakhfakh, sans convaincre. Ainsi la présidence du gouvernement assure que l’erreur sera rectifiée et que le décret sera publié à nouveau dans le Journal officiel.
Le CSM s’oppose aux dispositions du gouvernement
Mais ce n’est pas là le seul cafouillage qui embrasse la Kasbah. Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a fait part aujourd’hui lundi de son opposition aux dispositions prises par le gouvernement et le ministère de la Justice concernant le confinement sanitaire ciblé et la reprise progressive du travail dans les tribunaux.
Ainsi le CSM demande aux magistrats de « s’en tenir uniquement à la note qu’il a publiée le 28 avril dernier portant sur les modalités de travail dans les tribunaux telles qu’elles ont été appliquées durant la période de confinement sanitaire généralisé ».
Le CSM qui a tenu dimanche une assemblée générale extraordinaire, a estimé que le décret-loi n°2020-208 fixant les dispositions du confinement sanitaire ciblé complique sérieusement le processus législatif. Or, « le CSM est l’organe de gestion du pouvoir judiciaire, en application de l’article 2 de la loi organique portant création du CSM (2016) ».
Pour le CSM, la ministre de la Justice a fixé les modalités et les conditions de la reprise progressive du travail sans appui juridique et a délibérément ignoré le conseil et par conséquent le pouvoir judiciaire.
Voilà qui laisse augurer de nouvelles lenteurs dans la reprise des travaux des tribunaux, à l’approche des vacances judiciaires de l’été. Le dernier bilan Covid-19 du ministère de la Santé, au soir du dimanche 3 mai 2020, fait état de 1013 cas confirmés sur un total de 24.406 prélèvements, pour 42 décès et 328 rétablissements.