Tragédie de Kerkennah : nouveau bilan et réactions politiques

 Tragédie de Kerkennah : nouveau bilan et réactions politiques

A Sfax


Les corps de quatre autres migrants ont été repêchés aujourd’hui mardi, au large des îles de Kerkennah, portant à 55 le nombre total de victimes, selon un dernier bilan du ministère de l’Intérieur. Les réactions des officiels et des figures publiques oscillent entre le dépit et la nécessité d’un « plan de salut national ». 


Les garde-côtes, la marine nationale, la protection civile et la douane poursuivent leurs recherches, ajoute la même source, qui avaient repris à 5h30 du matin. Une embarcation de fortune avait pour rappel coulé dans la nuit de samedi à dimanche à seulement 5 miles des Iles Kerkennah. Sur un total d’environ 200 migrants, 68 ont finalement pu être secourus. Outre les victimes tunisiennes, des dizaines de migrants de différentes nationalités africaines étaient à bord du bateau.


 


BCE appelle à l’accélération de l’enquête


Signe que l’exécutif a conscience du caractère politiquement explosif de l’évènement, le président de la République Béji Caïd Essebsi avait convoqué lundi au Palais de Carthage un entretien avec le chef du gouvernement Youssef Chahed.


Au moment où des manifestations spontanées anti gouvernement se sont déclenchées en marge des funérailles collectives, la réunion avait pour objet les moyens déployés pour mener à bien les opérations de recherches des disparus en mer, ainsi que l’assistance aux familles des victimes avec la célérité requise, mettant l’accent sur l’importance d’accélérer l’enquête pour déterminer les responsabilités.


Présidant dans la foulée une réunion à la Kasbah en présence des ministres de la Défense et de l’Intérieur ainsi que de hauts cadres sécuritaires et militaires, Chahed a décidé la création, au niveau du gouvernement, d’une commission de crise pour soutenir les familles et prendre en charge les rescapés.


 


Les forces armées bientôt déployées sur l’île


« Les forces de l’ordre, tous corps confondus, seront déployées bientôt à l’île de Kerkennah pour combler le vide sécuritaire et lutter contre le crime organisé », a déclaré pour sa part le ministre de l’Intérieur, Lotfi Brahem, allusion au relatif vide sécuritaire qui règne sur l’île depuis l’année 2017 qui avait connu des affrontements entre locaux et forces de l’ordre qui y avaient connu de nombreux dégâts matériels.


« La traite des êtres humains est le commerce de la mort », a poursuit Lotfi Brahem sur un ton grave lors d’une visite inopinée dans le gouvernorat de Sfax.


« Les institutions sécuritaire et militaire sont à pied d’œuvre pour lutter contre l’émigration irrégulière et traquer les passeur », a-t-il tenté de rassurer au cours d’une réunion extraordinaire du Conseil régional de sécurité organisée sur fond de cette traversée de la mort.


 


Bilan décuplé en 2018…


Près de deux mille migrants tunisiens sont arrivés en Italie entre le 1er janvier et le 30 Avril 2018, dont 39 femmes, 307 mineurs et 293 non accompagnés, révèle ainsi l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), un organisme affilié aux Nations Unies.


« Ils étaient 231 pour la même période en 2017 », précise un communiqué de l’OIM publié à l’issue du naufrage d’une embarcation au large de Kerkennah- Sfax, appelant à l’adoption d’une approche basée sur le dialogue et la coopération en vue d’apporter une meilleure réponse aux défis migratoires.


L’organisation onusienne préconise d’intensifier les activités de sensibilisations et autres campagnes d’information ciblées autour des risques du projet migratoire irrégulier et la promotion des alternatives légales « pour que la migration soit un choix éclairé et non une nécessité absolue ». En vain, pour une jeunesse qui voit toujours en l’Europe un eldorado.


Tandis que pour l’UE, la lutte contre le chômage demeure la clé : « La lutte contre le chômage et la résolution des crises à l’échelle régionale demeure une réponse adéquate à l’émigration clandestine » a estimé, mardi, l’ambassadeur de l’Union Européenne en Tunisie Patrice Bergamini.


Parmi les 60 victimes transférées vers le service de la médecine légale à l’hôpital Habib Bourguiba de Sfax, 48 sont tunisiennes, dont 24 identifiées à cette heure, alors que 12 sont non-tunisiennes (6 femmes et 6 hommes). Les 68 survivants comptent de leur côté 60 tunisiens, 2 marocains, un libyen, un malien, un camerounais et 3 ivoiriens dont 2 femmes.


Les migrants auraient payé chacun un montant de 2000 à 3000 dinars tunisiens, soit 1000 euros, pour cette traversée funeste.  


 


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