Tunisie : tollé suite à la condamnation à 30 ans de prison pour du cannabis

 Tunisie : tollé suite à la condamnation à 30 ans de prison pour du cannabis

Le 30 janvier, le tribunal du Kef en Tunisie, a condamné à 30 ans de prison trois personnes pour consommation de cannabis. La toile n’a pas tardé à s’enflammer suite à un jugement estimé absurde et disproportionné. Des manifestations ont également éclaté le week-end dernier dans le pays pour réclamer la libération immédiate des condamnés, ainsi que l’amendement des lois en vigueur, notamment le fameux article 52 de la loi pénale tunisienne. Jack Lang, président de l’IMA, a par ailleurs déploré que « l’exemplaire démocratie tunisienne mérite mieux ».

Le juge d’instruction du tribunal de première instance du Kef a condamné trois jeunes hommes à une peine de 30 ans de prison ferme pour consommation et détention de stupéfiants dans un lieu public. Le jugement, rendu le 30 janvier, « ne porte pas uniquement sur la consommation de stupéfiants, mais aussi l’usage d’un terrain de sport pour la consommation de drogue », a indiqué à l’AFP dimanche le porte-parole du tribunal, Mohamed Faouzi Daoudi, citant « la loi 52 et les chapitres 7 et 11 ». Cette dernière prévoit une peine sévère pour la consommation de stupéfiants dans l’espace public. Les trois accusés, âgés de moins de 30 ans, peuvent faire appel du jugement.

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« Briser la jeunesse »

Les organisations de défense des droits humains n’ont pas tardé à dénoncer cette condamnation estimée absurde. La directrice du bureau régional d’Amnesty International, la Amna Guellali, a jugé « inacceptables par principe toutes les condamnations émises concernant la consommation et la possession de stupéfiants ». Il s’agit d’ « un moyen de dissuasion visant les jeunes, non pas pour introduire des réformes sinon pour briser la jeunesse », a-t-elle déploré.

La Ligue tunisienne des droits de l’Homme a pour sa part dénoncé un « verdict injuste », par la voix du responsable de sa branche au Kef, Nour Khammassi, réclamant une « révision des chapitres de la loi 52 ».

« Comment comprenez-vous les droits humains ? »

Suite à ce jugement, les réseaux sociaux se sont également enflammés sous le hashtag en arabe « #la prison-non, changez la 52 » et ont appelé à manifester. L’universitaire Raja Ben Slama a vivement critiqué les juges du tribunal du Kef sur sa page Facebook, pour « un verdict absurde et contraire aux droits humains, à la Constitution, aux conventions et à tout ce qui est humain ». « Comment comprenez-vous la Constitution, la démocratie et les droits humains ? », s’indigne-t-elle.

« L’exemplaire démocratie tunisienne mérite mieux »

De son côté, Jack Lang, président de l’Institut du Monde Arabe a réagi dans un tweet pour dénoncer le verdict : « Comment un tribunal tunisien peut-il condamner à 30 ans de prison ferme trois jeunes pour avoir consommé du cannabis, en vertu d’une loi de Ben Ali ? L’exemplaire démocratie tunisienne mérite mieux. Je conjure les autorités tunisiennes d’intervenir pour éviter cette peine injuste ».

« Des cibles et des victimes de criminels »

La classe politique s’est aussi saisie de l’affaire : « Une erreur de jeunesse ne doit pas détruire leur avenir. Je m’engage avec d’autres collègues, à présenter dans les plus brefs délais un nouveau projet de loi. Nous allons œuvrer avec conviction pour la révision urgente de la  loi. Ensemble sauvons ces jeunes et rappelons-nous qu’ils ne sont pas des criminels, mais des cibles et des victimes de criminels qui eux, doivent être traduits en justice », a réagi le député et ancien ministre Hichem Ben Ahmed.