Tunisie. Sortie de crise politique : l’initiative de l’UGTT fédère de nouvelles forces
Plusieurs partis politiques, des associations de la société civile mais aussi des figures publiques ont annoncé ces dernières 48 heures leur adhésion à ce qu’il est désormais convenu d’appeler l’initiative du quartet autour de la centrale syndicale UGTT. Objectif : contraindre le président de la République Kais Saïed, qui gouverne seul depuis un an et demi, à dialoguer avec le reste des forces vives du pays.
Il s’agit pour l’ensemble de ces intervenants « d’agir par tous les moyens pacifiques et légitimes » pour « stopper le processus enclenché le 25 juillet 2021 ». Mais principale différence avec l’autre grand front anti Saïed chapeauté par Néjib Chebbi et qui intègre les islamistes d’Ennahdha, le front coalisé avec l’Union générale des travailleurs tunisiens affiche son rejet radical du « système d’avant le 24 juillet 2021 ».
La veille du second tour des législatives qui se déroulent dans l’indifférence générale en Tunisie, dans un texte aux allures de manifeste intitulé « Déclaration du 26 janvier », publié aujourd’hui vendredi, les signataires du document considèrent notamment que le processus électoral actuel est « dépourvu de toute légitimité populaire, ce qui aggrave davantage la crise politique dans laquelle a sombré le pays », considèrent-ils.
Le pouvoir joue son va-tout judiciaire
En apparence imperturbable, l’actuel pouvoir a procédé cette semaine à une nouvelle escalade contre des symboles de l’opposition. Après l’ancien député Seif Eddine Makhlouf arrêté à son domicile par une vingtaine d’hommes en civil, la justice militaire a convoqué la militante Chaima Issa aujourd’hui 27 janvier. Cette dernière a refusé de répondre aux questions lors de son audience estimant que les civils n’ont pas à être jugés par une juridiction militaire.
Pour les signataires de l’initiative de l’UGTT, qui comprend également l’Ordre des avocats, la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’Homme et le Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES), l’initiative vise avant tout à défendre les acquis démocratiques et sociaux des Tunisiens d’une part, et l’Etat de droit et des libertés d’autre part.
Les signataires ont par ailleurs souligné leur détermination à élaborer des visions stratégiques pour sortir le pays du blocage institutionnel sans précédent qu’il traverse, et redonner espoir aux Tunisiens, « dans le cadre commissions dirigées par des compétences nationales ». Parmi leurs composantes, citons le parti Al-Massar, le parti socialiste tunisien, le collectif Soumoud, Sghaier Zakraoui (universitaire), Hamadi Ben Jaballah (universitaire et analyste politique), Mohamed Kilani (ex-secrétaire général du Parti socialiste) et Jouneidi Abdeljaoued (dirigeant d’Al-Massar).
S’inspirant de l’UGTT de Houcine Abassi et du quartet tunisien du dialogue nobélisé en 2015, ce noyau du « quartet 2.0 » a en outre annoncé son ambition de concevoir une plateforme politique, économique et sociale fondée sur des dénominateurs communs, ouverte à toutes les associations de la société civile, personnalités indépendantes, organisations de jeunesse, féministes et culturelles, aux alliés progressistes et à toute entité politique démocratique. Mission autoproclamée : créer un nouvel équilibre des forces, de sorte de « perpétuer les valeurs de la République » contre la vague populiste qui s’empare du pays. Une opposition agissant ainsi en ordre dispersé peut-elle toutefois espérer un quelconque résultat tangible ? Rien n’est moins sûr.