Sarkozy à Tunis, une visite à forte connotation idéologique

 Sarkozy à Tunis, une visite à forte connotation idéologique

Hafedh Caïd Essebsi posant aux côtés de Nicolas Sarkozy à Gammarth


Au terme de trois jours de visite, Nicolas Sarkozy quitte la Tunisie non sans avoir laissé derrière lui quelques polémiques. Personnage particulièrement détesté par la population locale, si son séjour avec protocole « high profile » n’a pas suscité de protestation dans la rue, il laissera cependant des traces en termes d’image de Nidaa Tounes, son parti hôte. Une image déjà altérée par la récente signature d'un accord avec l'OTAN.




 


Avec à son bord Pierre Lellouche et Rachida Dati, la délégation des Républicains avait un très sarkozyste goût de discrimination positive.


Chef contesté de sa propre famille politique, il n’est pas certain que Sarkozy soit le candidat de la droite aux présidentielles de 2017, à en croire le dernier sondage de l’Ifop daté du 19 juillet, qui révèle un leader en ballotage défavorable face à son grand rival Alain Juppé (écart réduit à 52/48).


D’où le besoin pour le candidat Sarkozy d’exorciser l’un des plus gros points d’ombre de son mandat présidentiel, outre « les affaires » : les casseroles liées à la politique étrangère, dont le soutien à la répression de la révolution tunisienne en 2010, la mise perdante sur l’Union pour la Méditerranée avec Ben Ali et Moubarak, ainsi que l’instigation du bourbier libyen.


Jamais très loin du dérapage verbal, surtout en territoire tiers-mondiste, Sarkozy a une fois de plus dérapé, à la manière de son hôte Béji Caïd Essebsi, autre adepte des provocations sémantiques régulières qui laissent entrevoir des idées essentialistes.


En précampagne également, c’est Mohsen Marzouk, nouveau secrétaire général de Nidaa Tounes qui, selon nos sources au parti, est derrière cette invitation de jumelage des droites dures. C’est avec lui qu’a eu lieu l’escapade de lundi dans la Médina, sous haute surveillance, où l’ancien président français s’est livré à l’un de ses exercices de com’ favoris : le shooting photo veste sur l’épaule.


« Applaudi par les commerçants de la Médina de Tunis, Nicolas Sarkozy a dû croire un instant qu’il avait surpassé Jacques Chirac dans sa popularité auprès des peuples arabes. Seule petite différence toutefois : la visite de Jacques Chirac dans la partie arabe de Jérusalem était un acte de courage et de défiance à l’égard d’Israël, alors que la visite actuelle de Nicolas Sarkozy dans la Médina de Tunis est un acte de repentance », ironise le politologue Vincent Geisser.


 


Les divisions de Nidaa Tounes refont surface


A Nidaa, la visite n’est pas non plus du goût de tout le monde. Boycottée par Taieb Baccouche, représentant du courant le plus à gauche du parti, la visite n’a pas non plus été appréciée par le camp Nidaa favorable à Alain Juppé, indigné que Faouzi Elloumi l’un des financiers du parti déclare, selon nos sources, que « Sarkozy sera le candidat officiellement soutenu par Nidaa Tounes » en Tunisie et en France.


Vers un axe néoconservateur Paris – Tunis en 2017 ? Pas si sûr, au moment où le parti majoritaire tunisien est au cœur d’une tempête médiatico-politique, résultat de son soutien à l’initiative de projet de loi dit de « réconciliation économique » aspirant à amnistier les hommes d’affaires corrompus.


« L’ironie du sort voudrait qu'en ce moment précis où Essebsi enterre la révolution, vienne en Tunisie en visite officielle Sarkozy, l'apothicaire en chef de la bling-blinguerie française », conclut le caricaturiste « Z ».


 


S.S