Réserves en devises, inflation… des indicateurs dans le rouge
Le stock des réserves en devises de la Tunisie n'en finit plus de baisser. Ainsi son niveau a atteint hier 6 mars 2018 l'équivalent de 11,25 milliards de dinars ou 78 jours d'importation, soit une somme proche des plus bas historiques, bien en deçà du seuil considéré critique des 90 jours.
Sous l’effet des règlements importants en devises auxquels la Tunisie procède, outre ceux au titre du service de la dette, les avoirs nets en devises de la Banque centrale tunisienne poursuivent donc leur chute, enregistrant depuis le début de l'année de fortes pressions, dans l'attente des recettes prévues des exportations d’huile d’olive et de dattes, ainsi que des revenus du secteur touristique. Mais ce n’est pas là le seul chiffre en berne en ce début d’année 2018 décidément désastreux.
Une inflation galopante
Le taux d’inflation a quant à lui atteint le très préoccupant niveau de 7,1% contre 6,9% enregistrés le mois précédent et surtout 4,6% le même mois en 2017, avait annoncé lundi l'Institut National de la Statistique (INS). Un regain qui provient selon la même source de « l'accélération de la hausse des prix du groupe d’habillement et chaussures (6,9% contre 5,9%) et le groupe transport (9,5% contre 8,7%) ».
L’augmentation la plus spectaculaire qui plombe le panier des consommateurs tunisiens est celle du prix des fruits, avec + 20,6%, des poissons : + 8,2% et des viandes : + 8,0%. Hors produits frais, les prix de l'alimentation sont eux aussi en hausse sur un an de 7,2%…
Les prix des services de santé sont par ailleurs en hausse de 7,2%, et ceux des loyers augmentent de 4.2%. Seuls les prix des services de transports se stabilisent sur un an à « seulement » + 1,3%.
La BCT tente de réagir
Souhaitant visiblement marquer le coup de sa récente investiture à son poste, le nouveau gouverneur de la Banque centrale tunisienne a réuni son conseil d’administration le 5 mars et décidé d'augmenter le taux directeur de la BCT de 75 points de base le portant ainsi de 5% à 5,75%. Un taux resté longtemps inchangé sous la gouvernance de son prédécesseur plus conservateur en la matière, Chedly Ayari.
L'institut d'émission explique que cette procédure a pour objectif de faire face à des risques réels d’une poursuite de l’inflation en 2018, qui s’est déjà appréciée de 2 points par rapport à la moyenne de 5,3% enregistrée sur l’ensemble de l’année 2017.
Une accélération de l'inflation qui a été enregistrée selon la BCT en ce début d’année « principalement en raison de la forte progression de l’indice des prix à la consommation (IPC) en janvier 2018 » : + de 1,1% (contre + 0,4% en décembre 2017).
Mais ce n’est pas tout, un certain nombre d’indicateurs conjoncturels, en particulier celui de l’envolée probable des prix internationaux des produits de base et surtout de l'énergie, prédisent des pressions inflationnistes supplémentaires au cours de la période à venir.
D’où cette « action proactive » de la BCT par le resserrement de la politique monétaire en se basant sur le taux d’intérêt en tant qu’instrument traditionnel pour une meilleure allocation des ressources financières. « Trop peu trop tard », rétorquent certains spécialistes…
Seif Soudani