Report de l’examen du projet de loi sur la réconciliation, sous la pression de la rue
Initialement prévu pour ce vendredi 28 juillet 2017 lors d’une séance plénière à l’Assemblée, l’examen du projet de loi sur la réconciliation a été reporté sine die, après les vacances parlementaires. La veille, des heurts d’une violence inédite avaient opposé des manifestants contre le projet de loi aux forces de l’ordre.
MAJ 12.00 : Le bureau de l’ARP a fixé l’examen du texte de loi soit à la session extraordinaire de septembre prochain, soit après la rentrée parlementaire, en octobre 2017.
Officiellement, le report du vote intervient selon le bureau de l’ARP suite à l’absence d’avis consultatif du Conseil Supérieur de la Magistrature qui tarde donner une réponse. L’ARP avait en effet sollicité le CSM au sujet du projet de loi dès le jeudi 20 juillet 2017, conformément à l’article 42 de la loi fondamentale du Conseil. Pour l’avocat Charfeddine Kellil, un passage de la loi sans ce vote ouvrirait la voie ultérieurement pour des recours en justice.
Mais selon plusieurs observateurs, l’escalade du mouvement de protestation, chapeauté par les jeunes militants de « Manich Msamah », a probablement été déterminante dans le report décidé aujourd’hui. Echaudés par l’annonce dans le calendrier de l’ARP du passage à l’examen de la loi polémique, certes dans sa troisième version allégée, des centaines de sit-inneurs se sont donné rendez-vous jeudi soir à l’esplanade du Bardo.
Conscients que cela pourrait être le bras de fer final, ils décident tard dans la nuit jeudi à vendredi de planter une tente géante. Mais au moment de l’installer, la police anti émeutes charge la foule et tente, en vain, de confisquer la tente, au motif d’absence d’autorisation. Violente, la bousculade résultera en plusieurs arrestations. S’ils se félicitent d’un énième report, les manifestants étaient loin de crier victoire à la mi-journée.
L’ancien président Moncef Marzouki avait à son tour appelé jeudi au « devoir de faire barrage par tous les moyens pacifiques » contre ce qu’il a qualifié de « loi de protection des corrompus ». Au festival de Carthage, la police avait interdit le port du T-shirt emblématique de la campagne Manich Msamah à des jeunes, leur demandant de se changer s’ils voulaient pouvoir accéder aux gradins. Une anecdote qui a résulté en un élan supplémentaire de sympathie pour le mouvement.
Amendée dans un premier temps pour en exclure les crimes de change, puis rebaptisée récemment en « projet de loi sur la réconciliation administrative », pour se focaliser sur les violations commises par d’anciens hauts fonctionnaires, le texte devient en soi un enjeu politique pour son auteur, la présidence de la République, résolue à le faire voter sous quelque forme que ce soit.
S.S