Rentrée scolaire : les impopulaires chantiers du ministre de l’Education
Avec plus de six mille établissements scolaires, dont 32 créés cette année, la rentrée scolaire est un mastodonte à gérer pour le ministère de tutelle. Pour sa première rentrée en tant que ministre de l’Education, le turbulent Néji Jelloul s’apprête à engager d’importantes « réformes structurelles » qui risquent de ne pas arranger ses rapports tumultueux ni avec les syndicats d’enseignants, ni avec les élèves…
Première mesure phare annoncée en marge d’une conférence de presse la veille de la rentrée, lundi 14 septembre : le ministère se dirige vers une interdiction des cours particuliers en dehors de l’espace pédagogique. En cause, le chantage indirect subi par les élèves, exercé par des professeurs peu scrupuleux réglant leur barème en fonction de l’enrôlement ou non aux cours particuliers. Une pratique qui s’est généralisée ces dernières années.
"Fini la récré !"
Moez Boubaker, chef de cabinet du ministre, a précisé que les tarifs des cours particuliers seront fixés ultérieurement par les deux ministères de l’Éducation et des Finances. « Un tarif dérisoire, voire symbolique, de l’équivalent de moins d’1 euro / heure », selon un représentant du syndicat UGTT de l’enseignement de base.
Reste la faisabilité de la chose : « un vœu pieux », selon la plupart des observateurs du secteur, pour qui il est difficile en effet de contrôler les enseignants jusque dans leur domicile où ont souvent lieu ces fameux cours appelés « études » dans le jargon local.
Plus controversé, du moins pour ce qui est, là aussi, de sa faisabilité, l’obligation du port du tablier dans le secondaire pour les garçons, censée mettre fin à des décennies d’inégalité en la matière. Une mesure qui réjouit bon nombre de féministes qui dénonçaient de plus en plus cette injustice ces dernières années.
« Ce sera d’une manière générale le symbole de la rupture avec les années de laxisme », argue le ministre qui a rappelé le relâchement disciplinaire observé depuis 2011 en matière de lutte contre l’absentéisme.
Autre réforme de taille, inspirée par certains pays occidentaux, la mise en place progressive du régime de la séance matinale unique, accompagnée d’une réduction des jours de vacances jugés « bien trop nombreux » pour le ministre, ainsi que d’une abrogation de la « semaine bloquée », remplacée par un système de contrôle continu s’agissant des examens trimestriels.
Mise en application depuis juin 2015, l’annulation de la prise en compte à hauteur de 25% de la moyenne annuelle dans la note finale des examens du bac est destinée à « redorer le blason des diplômes nationaux tunisiens », a rappelé Jelloul pour qui l’image de ces diplômes s’est lentement dégradée à l’étranger. Pour ce faire, il a indiqué qu’il comptait sur l’appui des deux ministères de l’Emploi et de la Formation professionnelle ainsi que celui de l’Enseignement supérieur dans cette entreprise de réhabilitation.
Enfin, « le tout numérique » constitue par ailleurs un autre chantier qui n’échappe pas aux critiques : en déplacement fin août à El Mida, le ministre des Technologies de la communication et de l’économie numérique, Noômane Fehri, avait annoncé que « toutes les écoles du gouvernorat de Nabeul seront connectées à Internet, et ce avant la fin de l’année en cours ». Commencer par le littoral du Cap Bon, déjà considéré comme étant parmi les mieux lotis en termes d’infrastructure, voilà un choix politique qui risque de faire grincer les dents des décentralisateurs.
Seif Soudani