Tunisie. Présidentielle : le candidat Maghzaoui et le procès en figuration

 Tunisie. Présidentielle : le candidat Maghzaoui et le procès en figuration

Le candidat à la présidence Zouhair Maghzaoui, 43 ans, rencontre des habitants dans un café lors de sa visite à La Goulette, dans la banlieue de Tunis, pendant sa campagne pour l’élection présidentielle, le 18 septembre 2024. Maghzaoui, ancien parlementaire, est l’un des deux seuls candidats approuvés par l’autorité électorale, l’ISIE, pour défier le président Kais Saied lors du scrutin du 6 octobre. (Photo : FETHI BELAID / AFP)

Ancien allié de Kais Saïed, le candidat à l’élection présidentielle, Zouhair Maghzaoui, a à son tour annoncé dans les médias nationaux mercredi 18 septembre 2024 son manifeste de campagne électorale. Un texte qu’il présente comme un programme conçu « pour répondre aux attentes de la population tunisienne », mais par lequel il tente surtout de se soustraire à l’image de figurant à l’idéologie analogue à celle de l’archi favori Saïed.  

 

Maghzaoui a visiblement tenté de profiter de l’affluence des Tunisiens à Kairouan en marge des fêtes du Mouled pour y faire l’une de ses premières incursions de campagne

 

Lors de son intervention aujourd’hui dans l’émission la plus écoutée du paysage audiovisuel tunisien, Zouhair Maghzaoui a mis l’accent sur la nécessité d’une réforme profonde du secteur éducatif, en cette rentrée scolaire endeuillée par la mort d’un enfant en Tunisie sous les coups de son camarade. Le candidat d’obédience panarabiste a déploré la dégradation du système scolaire tunisien, soulignant qu’une « véritable révolution » est nécessaire pour y moderniser l’enseignement, numériser les établissements et améliorer les infrastructures scolaires. Il a également pointé la détérioration des conditions de travail des enseignants, promettant d’intégrer les enseignants suppléants et de combler les lacunes structurelles.

Maghzaoui a en outre plaidé pour une révision complète des programmes éducatifs qu’il estime « obsolètes », proposant de faire de l’anglais la deuxième langue nationale tout en encourageant l’apprentissage d’autres langues. Il a enfin réaffirmé l’importance de la formation professionnelle, considérant qu’elle doit retrouver son aura et être reconnue au même titre que l’éducation dans les cursus généralistes.

 

Un énième pari sur les dons

S’agissant de l’enseignement supérieur, le candidat qui conserve sa sensibilité socialiste a promis de « mener un audit exhaustif des établissements privés », qu’il accuse notamment de proliférer de manière incontrôlée. Il a aussi exprimé la nécessité de réévaluer le système LMD (Licence-Master-Doctorat) et de revoir les conditions d’attribution des bourses universitaires.

Parmi les solutions avancées, Maghzaoui propose la création d’un fonds spécial pour la réforme de l’éducation et le soutien à la recherche scientifique. Ce fonds serait alimenté par des dons des Tunisiens résidant à l’intérieur et à l’extérieur du pays, ainsi que par une contribution de 5 % des bénéfices des institutions privées d’enseignement, des compagnies pétrolières, des banques, et des grandes surfaces. Sur la toile, il est aussitôt critiqué par des internautes pour miser de façon risquée et peu inventive, comme l’ont fait avant lui d’autres dirigeants, sur la bonne volonté des citoyens et de leurs dons.

Mais le principal grief auquel fait face l’ancien secrétaire général du parti nationaliste Echaâb reste l’image de « comparse », sorte de doublure destinée à corroborer le narratif de vernis démocratique de ce scrutin où l’unique autre aspirant en dehors du chef de l’Etat, le libéral Ayachi Zammel, croupit en prison. Certains l’appellent à ce titre à se retirer de la course, auquel cas cela laisserait le candidat Saïed seul en course en vue d’un plébiscite en bonne et due forme. Un appel auquel il oppose une fin de non-recevoir, réitérant à qui veut bien l’entendre ses chances d’incarner « une alternative sérieuse » pour le changement.

Seif Soudani