Tunisie. Présidentielle : la justice réintègre la candidature Mondher Zenaïdi

 Tunisie. Présidentielle : la justice réintègre la candidature Mondher Zenaïdi

Mondher Zenaïdi

C’est un autre rebondissement de taille qui vient rebattre les cartes du scrutin du 6 octobre prochain, après la restauration mardi du dossier de candidature de Abdellatif Mekki. Le Tribunal administratif a en effet annoncé aujourd’hui jeudi 29 août la réadmission dans la course à la présidentielle de l’ex-ministre du régime Ben Ali, Mondher Zenaïdi.

Si la nouvelle fait l’effet d’un mini séisme en Tunisie, c’est que le candidat réfugié depuis plusieurs années à Paris est considéré par certains comme un rival relativement sérieux pour le président Kais Saïed, dans la mesure où il pourrait bénéficier d’anciens réseaux RCDistes dormants.

Zenaïdi pourrait par ailleurs rallier une bonne partie de l’opposition dite moderniste du pays sur la base de ses compétences, fort d’un CV d’ex multi-ministre à des postes techniques du temps où la croissance affichait ses derniers bons chiffres d’avant révolution.

 

Décisions contraignantes et définitives

Le 27 août 2024, cette même juridiction avait annoncé la remise en selle d’un autre candidat, disqualifié dans un premier temps, Abdellatif Mekki, un ex-dirigeant du mouvement Ennahdha, en acceptant également son recours en appel. Deux décisions « définitives » en matière de code électoral.

« Le tribunal a décidé d’accepter sur la forme et le fond le recours en appel déposé par Mondher Zenaïdi et d’annuler la décision initiale de l’autorité électorale ISIE », a indiqué jeudi son porte-parole Faycel Bouguerra. Si cette décision doit encore être confirmée par l’ISIE qui prévoit de communiquer la liste définitive des candidatures le 4 septembre prochain, cela ne devrait être qu’une formalité.

Selon plusieurs observateurs, à 73 ans Zenaïdi, actuellement à l’étranger, est considéré comme un candidat au poids non négligeable également parce qu’il pourrait obtenir des voix des principaux partis d’opposition, dont les islamistes les plus pragmatiques d’Ennahdha qui s’étaient alliés par le passé à des profils similaires au sien. Les pro Saïed estiment quant à eux improbable le retour aux affaires d’« éléphants » rejetés il y a 14 ans par les Tunisiens.

Pour rappel, le 10 août, l’ISIE avait annoncé n’avoir retenu que trois candidatures, dont celle du président Saied, élu démocratiquement en 2019 avant de s’octroyer les pleins pouvoirs à l’été 2021, et accusé depuis de dérive autoritaire.

 

La tardive rébellion de Maghzaoui

Les deux autres candidats en lice étaient Zouhair Maghzaoui, ex-député de la gauche nationaliste panarabe, et l’industriel quadragénaire, Ayachi Zammel. Considéré au départ comme simple figurant politiquement proche de Saïed, Zouhair Maghzaoui a cependant haussé le ton de façon surprenante dans une conférence de presse livrée hier mercredi, qualifiant le mandat de l’actuel président de « catastrophique » :

 

Au total 14 autres postulants avaient néanmoins été recalés pour nombre insuffisant de parrainages, manque de garanties financières ou non-respect des critères de nationalité. Le porte-parole du tribunal a en revanche annoncé jeudi le rejet du recours en appel de la dirigeante du Parti Destourien Libre (PDL), Abir Moussi, autre opposante farouche à Saïed, qui se revendique de l’héritage des autocrates Habib Bourguiba et Ben Ali. Elle est emprisonnée depuis octobre 2023 pour diverses accusations dont celle de « complot contre la sûreté de l’Etat ».

Malgré cette récente et légère détente judiciaire, plusieurs ONG tunisiennes et étrangères ont critiqué le processus de sélection des candidats. Le 20 août, Human Rights Watch estimait « qu’au moins huit candidats potentiels avaient été poursuivis en justice, condamnés ou emprisonnés » et, de facto, « empêchés de se présenter ». D’autres prétendants au poste comme l’amiral Kamel Akrout, un ancien conseiller présidentiel ou le militant arrêté puis relâché Safi Saïd, se sont plaints d’avoir été entravés sur le plan administratif pour obtenir divers documents attestant notamment leurs casiers judiciaires respectifs.