Polémique après l’annulation sous la contrainte d’une visite d’un lycée par l’ambassadeur de France
L’ambassadeur de France à Tunis Olivier Poivre D’Arvor devait visiter mardi 7 février un établissement secondaire public à Radès, afin d’assister à un cours de français. On apprend aujourd’hui que l’UGTT est intervenue pour fustiger le bien-fondé de cette visite, ce qui a résulté en son annulation pure et simple. Souverainisme exagéré, ou protestation légitime ? Un conseiller consulaire a en tout cas réagi de façon très peu diplomatique.
D’après la centrale syndicale, « cette visite est une entrave à la souveraineté de la Tunisie, du territoire national et des institutions éducatives tunisiennes ». Toujours selon le communiqué, cette visite représenterait « une forme de tutelle et de dépendance ». L’union générale tunisienne du travail a par ailleurs condamné « toutes les parties qui ont contribué à l’organisation de cette visite », tout en appelant les enseignants et les syndicats à refuser la visite de l’ambassadeur. Chose qu’ils ont faite, se pliant à la volonté de la branche syndicale de l’Education nationale particulièrement active et puissante dans le pays.
« Une visite de courtoisie »
Feten Ben Aissa, la professeur de français au Lycée de Radès (banlieue sud de la capitale) dont la classe était concernée par cette visite, affirme pour sa part avoir elle-même invité l’ambassadeur à venir assister au cours : « les élèves avaient préparé des projets sur la France, il y a aussi la journée mondiale de la francophonie qui aura lieu bientôt, c’était une double-occasion », ajoutant avoir obtenu l’autorisation du ministère de l’Education nationale et du ministère des Affaires étrangères ».
« Mais suite au communiqué de l’UGTT, on a dû annuler, pour des raisons de sécurité », conclue la jeune femme, en ces temps de grandes tensions entre les syndicats des enseignants et le pouvoir exécutif tunisien.
Sous la pression du syndicat et suite au communiqué en question, Olivier Poivre d’Arvor a annulé cette visite.
De son côté, le conseiller consulaire Laurent Caizergues déclare que « cette dénonciation n’avait pas lieu d’être, et que « les raisons sont farfelues ». Mais, plus problématique, sur sa page Facebook, l’homme avance que l’explication serait que « les professeurs concernés ne souhaitaient pas montrer leur niveau en français, (par) peur d’être jugés »…
Si l’UGTT et plus généralement la famille de la gauche radicale sont connues en Tunisie pour leurs positions traditionnellement souverainistes, historiquement nées d’une genèse de l’action syndicale en marge des batailles pour l’indépendance, les propos du conseiller Laurent Caizergues semblent quant à eux pour le moins incongrus, emprunts d’une forme de mépris pour les professeurs tunisiens, du moins de procès d’intention à leur égard dignes d’une pensée d’extrême droite.
Depuis sa récente prise de fonction à la rentrée, le mandat d’Olivier Poivre d’Arvor est décidément perturbé par diverses polémiques, notamment la veille de son arrivée à Tunis où il avait déclaré que sa mission est d’« assurer la sécurité des ressortissants français » présents en Tunisie, et de « faire que ce pays aille bien ». Il avait également qualifié la Tunisie de « fournisseuse de djihadistes et d’un certain nombre de radicalisés ».