Pas de réouverture des mosquées en Tunisie
Dans un pays où le ministre de la Santé Abdellatif Mekki, issu du parti islamiste Ennahdha, est de plus en plus sous pression de son propre camp, depuis le début de l’épidémie Covid-19, pour que soient rouvertes les mosquées, s’en tenir à la rationalité du principe de précaution est un bras de fer permanent.
Au moment où la Tunisie entame la deuxième phase de son déconfinement, de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer ce qui constitue selon elles le « deux poids, deux mesures » dans la permissivité des autorités s’agissant de l’inclusion en phase 2 de la plupart des types de commerces, et sa fermeté quant au maintien de fermeture des lieux de culte.
En ce mois de ramadan où les fidèles sont privés des traditionnelles prières nocturnes des tarawih, plusieurs groupes se créent sur les réseaux sociaux pour appeler à la réouverture immédiate des mosquées. On y avance notamment certains arguments récurrents comme le fait que les prieurs seraient moins propices à l’infection par le coronavirus du fait même des ablutions rituelles. « Parce qu’une fois à l’intérieur, ceux qui prient collectivement ne respirent ni ne toussent ? », ironise un internaute au milieu des débats souvent houleux sur la question et où l’excommunication n’est jamais très loin.
Comme pour les rassemblements de plus de 100 personnes et les évènements culturels, la reprise des prières collectives ne sera étudiée qu’à l’approche de la phase 3, le 24 mai prochain. Fin mars, le ministre des Affaires religieuses, Ahmed Adhoum, révélait dans un entretien télévisé que la décision de fermeture fut « difficile à prendre et a requis une grande part de persuasion à destination de l’opinion publique ».
Les autorités ont tranché
Aujourd’hui mardi 12 mai, c’est le directeur général des cadres et monuments religieux au sein du ministère des Affaires religieuses, Sami Guesmi, qui explique dans une déclaration à la TAP que la décision de fermeture des mosquées demeure en vigueur, et que leur réouverture est « soumise aux mesures prises par les autorités spécialisées ».
En réponse aux campagnes lancées sur les réseaux sociaux réclamant la réouverture des mosquées le 27ème jour du mois saint, Guesmi rappelle que la fermeture des mosquées est une mesure simplement préventive prise dans le cadre du confinement général : « le ministère a pris des mesures préventives durant la période de fermeture des mosquées afin de se préparer pour la date de la réouverture, dont la désinfection, le nettoyage et l’aération des locaux de façon régulière ».
La Tunisie est pour rappel en confinement général depuis le 22 mars 2020, tandis que la première phase du confinement ciblé a débuté le 4 mai. Pour la deuxième journée consécutive, le ministère de la Santé a annoncé qu'aucune nouvelle contamination n'a été enregistrée sur l’ensemble des 448 prélèvements effectués le 11 mai. Le bilan national reste donc stable à 1032 cas confirmés sur un total de 33.266 prélèvements avec 727 rétablissements et 45 décès. D’où la multiplication des appels à rouvrir les mosquées.
A l’autre bout du monde, même quand les chiffres sont bien plus alarmistes, même débat, mêmes pressions : « La foi est une grande alliée dans ce grave moment pour la nation : nous ne pouvons pas la limiter », ont justifié au Brésil les élus du lobby parlementaire évangélique, appelant les autorités à garder les églises et les temples ouverts et à éviter un confinement trop strict.