Tunisie/Palestine. Nabil Ammar interpelle l’Organisation de la francophonie
Depuis l’éclatement de l’actuel conflit meurtrier israélo-palestinien à Gaza, la diplomatie tunisienne s’active sur plusieurs fronts pour tenter d’infléchir les positions occidentales, en employant en cela des moyens inédits, motivés par la radicalité de la posture présidentielle pro palestinienne de Kais Saïed.
Ainsi le ministre des Affaires étrangères, de la Migration et des Tunisiens à l’étranger, Nabil Ammar, a eu hier jeudi 26 octobre, à sa demande, un entretien téléphonique avec la secrétaire générale de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), Louise Mushikiwabo, au sujet des bombardements de Gaza et « la nécessité d’y mettre fin sans délai ».
« Le ministre, en sa qualité de président de la Conférence ministérielle de la francophonie, a souligné que l’OIF, dont la Tunisie est un pays fondateur, ne peut, conformément aux valeurs fondamentales de la Francophonie, rester silencieuse face à une telle situation catastrophique », lit-on dans un communiqué faisant valoir le statut honorifique de la Tunisie qui avait accueilli le dernier Sommet international de la francophonie à Djerba, fin 2022.
>> Lire aussi : Gaza. Au Conseil de sécurité de l’ONU, la Tunisie en appelle à la communauté internationale
Cet entretien a par ailleurs eu lieu dans la perspective de la prochaine Conférence ministérielle de la Francophonie qui aura lieu à Yaoundé au Cameroun, sous présidence tunisienne les 4 et 5 novembre 2023. La même source précise que « les deux responsables ont convenu de la nécessité d’agir pour la mise en œuvre effective des valeurs communes du respect de la vie humaine et du vivre ensemble, telles que préconisées par l’OIF et devant prévaloir partout dans le monde ».
Convocation des ambassadeurs des grandes puissances
Mais au-delà de ces formules classiques, le chef de la diplomatie tunisienne s’était surtout cette semaine employé à mettre en œuvre la nouvelle doctrine du président Saïed, qui prône « des relations d’égal à égal » en la matière avec « les grands de ce monde ». Mardi, Nabil Ammar avait en effet une fois de plus à sa demande reçu les ambassadeurs accrédités en Tunisie des cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies, à savoir le Royaume-Uni, la Russie, la Chine, les États-Unis d’Amérique et la France.
Principal objectif affiché de cette réunion : remettre à ces ambassadeurs une lettre concernant la position tunisienne sur les développements sur le terrain en Palestine ainsi que « l’importance d’une action immédiate pour éviter toute escalade et faire face à la situation grave et tragique en Palestine occupée », selon un communiqué du MAE.
Le ministre a insisté à cette occasion sur « les principes fondamentaux de la position tunisienne, qui sont fermes, invariables et basés sur des valeurs humanitaires en soutien des causes justes, en particulier la question palestinienne ».
« La communauté internationale, notamment via ses acteurs influents, doit assumer ses responsabilités politiques et morales pour mettre fin immédiatement aux hostilités, préserver des vies et protéger les civils palestiniens à Gaza » a-t-il martelé, condamnant « les attaques lâches de l’occupation israélienne et l’utilisation d’armes particulièrement meurtrières dans des attaques ciblant délibérément des nourrissons, des enfants, des femmes et des personnes âgées, au service d’agendas politiques inexcusables et honteux, en violation flagrante de toutes les conventions et lois internationales ».
Ammar a expliqué que « le traitement de la situation actuelle avec les mêmes approches et méthodes d’avant le 7 octobre 2023, c’est-à-dire traiter les conséquences sans s’attaquer sérieusement aux causes principales des cycles de tension, de violence et d’instabilité, serait vain. Pire, cela compliquerait davantage la situation, intensifierait la violence et porterait atteinte à ce qui reste du système de valeurs universelles communes, nourrissant l’intolérance, la haine et l’extrémisme, en particulier parmi les générations futures ».
Visiblement soucieux d’apaiser les esprits, les ambassadeurs auraient selon la source tunisienne salué l’initiative d’organiser cette réunion et souligné l’importance de l’échange de points de vue sur la manière de résoudre la crise actuelle, de mettre fin à l’escalade, d’éviter l’élargissement du conflit et d’accélérer la fourniture de l’aide humanitaire aux bénéficiaires à Gaza, tout en garantissant le respect du droit international humanitaire. Une réaction somme toute convenue, qui tente d’occulter un malaise certain vis-à-vis des récents propos virulents du président Kais Saïed à l’égard des mêmes grandes puissances.