Tunisie. Nouvelle vague d’arrestations de figures publiques

 Tunisie. Nouvelle vague d’arrestations de figures publiques

Palais de justice de Tunis

Alors que l’opposition et la société civile pensait que le plus dur en matière de répression était passé, un nouveau tour de vis judiciaire vise différentes figures du monde des affaires, du journalisme et de la politique en ce début juillet chargé en arrestations et mandats d’amener.

Ainsi suite à la découverte lors d’une perquisition de sommes d’argent en devises tunisiennes et étrangères, mais aussi de quantités de drogue et d’un dispositif de pesée à son domicile, un juge d’instruction du Pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme a décidé hier 1er juillet de prolonger la garde à vue de l’homme d’affaires et ex gendre du président Ben Ali, Slim Chiboub, pour une durée de 5 jours, dans le cadre de lune enquête en cours visant l’ancien candidat à la présidentielle Samir Abdelli.

Plusieurs documents ont par ailleurs été saisis sur place, précise une source du Parquet, « tous placés sous scellés sur autorisation judiciaire ». L’enquête se poursuit selon les déclarations de Hanen Qadass, porte-parole du Pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme, qui a laissé sous-entendre que les investigations ont d’ores et déjà des ramifications complexes au moment où Chiboub pensait en avoir fini avec les ennuis judiciaires, après avoir purgé une peine de prison ferme précédemment entre 2014 et 2016 et être passé par le processus de justice transitionnelle en mai 2016 devant l’Instance vérité et dignité.

 

 Poursuites inédites contre Mekki, Mraihi et Frigui

Aujourd’hui mardi 2 juillet, c’était au tour du parti « Âmal wa Injaz » d’annoncer que son secrétaire général, Abdellatif Mekki, ancien ministre de la Santé et ex cadre d’Ennahdha, officiellement candidat à la présidentielle, vient d’être convoqué pour comparaître devant un juge d’instruction.

La formation politique (droite conservatrice) révèle dans un communiqué que la convocation en question pour la date du 12 juillet concerne l’affaire portant sur le décès de Jilani Daboussi : elle intervient cinq jours seulement après l’annonce officielle de la candidature d’Abdellatif Mekki, a en outre relevé le parti. Rappelons que Jilani Daboussi, décédé à l’âge de 67 ans quelques heures après sa libération de la prison civile de la Mornaguia, avait été incarcéré du 7 octobre 2011 au 7 avril 2014, soit une détention de deux années et demi. Il s’agissait alors d’une période dépassant de loin les délais fixés par la loi à 14 mois. En dépit des nombreuses demandes de libération et la détérioration de son état de santé, la justice avait maintenu l’ancien élu du temps de Ben Ali et de Bourguiba en détention.

Autre coup de filet, le ministère public près le tribunal de première instance de Tunis a décidé la veille l’ouverture d’une information judiciaire à l’encontre du candidat déclaré à la présidentielle Lotfi Mraihi, secrétaire général du parti de l’Union Populaire Républicaine (UPR), et de la secrétaire générale du même parti pour « blanchiment d’argent, transfert illégal de fonds à l’étranger et ouverture de comptes bancaires à l’étranger sans autorisation de la Banque centrale de Tunisie ».

Dans une déclaration lundi soir, le porte-parole du tribunal de première instance de Tunis, Mohamed Zitouna, a expliqué que cette action fait suite à une enquête antérieure impliquant ces deux responsables de l’UPR dans « la collecte de parrainages en contrepartie d’une rémunération ». Au cours de son audition, la dirigeante de l’UPR aurait avoué avoir délibérément participé avec Lotfi Mraihi au transfert illégal de fonds vers des comptes bancaires à l’étranger au nom du secrétaire général du parti. Il a alors été décidé de placer la dirigeante du parti en garde à vue pour une durée de cinq jours renouvelables et d’émettre un avis de recherche à l’encontre de Lotfi Mraihi considéré comme étant en fuite.

Le monde journalistique n’est pas en reste puisque le porte-parole de la Cour d’appel de Tunis, Habib Torkhani, a indiqué toujours lundi 1er juillet dans une déclaration à la presse que les agents de la direction des affaires criminelles d’El Gorjani ont arrêté l’animateur Afif Frigui, en exécution du mandat de dépôt émis à son encontre par la chambre des mises en accusation du Pôle judiciaire économique et financier.

Torkhani a précisé que ledit mandat de dépôt a été émis pour des accusations de « corruption financière et administrative dans la gestion d’une association, de falsification, de détention et d’utilisation de faux documents, et de délivrance d’un certificat contenant des informations mensongères », ainsi que plusieurs autres accusations de nature financière. Le responsable a ajouté que l’arrestation de Frigui était également basée sur un mandat d’amener émis à son encontre par le juge d’instruction près le Tribunal de première instance de Tunis.

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