Municipales : Ennahdha et les limites du relooking
En pleine campagne pour les municipales, une candidate du parti islamiste, tête de liste de la circonscription huppée de Sidi Bou Saïd, s’est montrée incapable de définir le projet sociétal d’Ennahdha. Extraits.
Loin d’être anecdotique, l’épisode est symptomatique de l’impréparation des plus grands partis pour ce rendez-vous électoral pourtant crucial pour le pays.
Sélima Ben Soltane n’aura pas fait le buzz qu’elle souhaitait. Interrogée par un narquois Boubaker Akacha sur la radio la plus écoutée du pays, Mosaïque FM, à propos du programme de son parti, cette médecin dentiste au look de femme libérée a passé un quart d’heure particulièrement pénible pour les auditeurs, ponctué d’embarras et de silences gênés surréalistes.
La candidate s’est en effet contentée d’affirmer qu’Ennahdha « oeuvre à la croissance du pays et à améliorer le statut de la femme »… A aucun moment le terme de "conservatisme" n'est prononcé.
Cheveux au vent, jeans déchirés et AKPisation
« Au fond de moi-même je ne suis pas une nahdhaouie… je n’ai jamais fait partie d’un parti politique, mais mes convictions personnelles se rapprochent plus de celles véhiculées par Ennahdha et j’adhère au projet de ce parti ». La jeune femme fait partie des personnalités initialement indépendantes que le parti sollicite (ou inversement) pour le représenter afin de combler les vacances aux quelques 350 listes électorales déployées sur l’ensemble du territoire, soit le plus grand nombre de liste, devant les listes de Nidaa Tounes (345 listes).
« Je suis originaire de Sidi Bou Saïd et j’aimerais améliorer la situation de cette région. Je rêve que Sidi Bou Saïd redevienne comme je l’ai connu dans mon enfance, que les habitants de la ville et des quartiers se rapprochent, qu’ils sourient de nouveau, qu’ils s’entraident. J’œuvrerai à résoudre les problèmes de ceux qui feront appel à moi » a simplement affirmé Sélima Ben Soltane concernant son projet pour la circonscription de Sidi Bou Saïd, ajoutant qu’il sera dévoilé « au fur et à mesure ».
Sur ses tenues vestimentaires, aux antipodes des valeurs véhiculées par le parti qu’elle représente, Mme Ben Soltane a souligné qu’elle a toujours porté des jeans déchirés, des pantalons serrés ou des jupes courtes et qu’elle n’estime pas être « différente des autres filles tunisiennes »… Un peu léger comme atouts de campagne ? C’est en tout cas ce qu’estime l’éditorialiste Fathi Mourali :
« Ceci prouve l'amateurisme des politiciens en Tunisie. Surtout lorsqu'on entend que Ennahdha es le parti le mieux organisé en Tunisie. Ceci explique leur rendement dérisoire. Pour se donner l'image d'un parti moderne il ne suffit pas de porter des jeans troues et des mini-jupes ni d'être une fausse blonde (sic). »
« Nous déclarons ouverte la saison du bêtisier », commentent des internautes sur les réseaux sociaux au sujet de cette campagne des premières élections municipales depuis la révolution de 2011, et où les prétendants sont légion. Car d’autres candidats font déjà l’objet de « memes » internet et autres détournements, à l’image de Naceur Goun, candidat du parti moderniste Machrouû Tounes (67 listes), qui a cédé son temps de parole à l’antenne de la TV nationale, également faute de pouvoir répondre à une question élémentaire à propos de la gouvernance locale.
Seif Soudani