Tunisie. Moody’s déplore l’absence de Cour constitutionnelle
Le 8 juillet dernier, soit près de deux semaines avant le coup de force présidentiel, l’agence Fitch Ratings avait déjà dégrade la note souveraine de la Tunisie à « B-« , avec perspectives négatives.
La même agence avait exprimé le 26 juillet son inquiétude face à la potentielle aggravation de la crise politique dans le pays. C’est à présent au tour de Moody’s de préparer les esprits à une éventuelle nouvelle dégradation de la note souveraine.
Pour l’économiste Ezzedine Saïdane, qui est néanmoins optimiste quant à l’annonce d’une nouvelle initiative de réconciliation avec les hommes d’affaires annoncée par Kais Saïed, un abaissement à une note de « C » pour la Tunisie serait dramatique, synonyme d’insolvabilité sur le marché international des emprunts.
« L’absence d’une Cour constitutionnelle est de nature à prolonger la crise politique que traverse actuellement la Tunisie, ce qui pourrait ralentir davantage la mise en œuvre des réformes économiques et par conséquent les négociations avec le Fonds Monétaire International (FMI) », a pour sa part prévenu le 2 août l’agence de notation Moody’s.
Dans son rapport publié lundi, en réaction à l’application de l’article 80 de la Constitution par le président de la République Kais Saïed, en vertu duquel il a limogé le chef du gouvernement, gelé les travaux du parlement et levé l’immunité des députés, Moody’s craint qu’une crise politique prolongée perturberait davantage les négociations avec le FMI sur un nouveau programme pluriannuel, déjà au point mort, et ce en raison de désaccords déjà préexistants avec les pouvoirs publics.
Des désaccords qui concernent essentiellement la réduction de la masse salariale de la fonction publique, la réforme des subventions des énergies et denrées de base, ainsi que le rôle des entreprises plus généralement dans l’économie, indique l’agence de notation américaine basée à New York.
Manque de visibilité et soutien saoudien
Cette dernière estime par ailleurs qu’il reste « peu probable » que le FMI souscrive à un nouveau programme sans l’approbation d’un train de réformes global, dans le cadre d’un « pacte social » rassemblant l’ensemble des acteurs décisionnels (syndicat, patronat, société civile, etc.).
Moody’s en conclut que cela pourrait augmenter les risques de manque de liquidités pour tout gouvernement intérimaire, chose qui serait de nature à compromettre davantage encore la viabilité de la dette extérieure.
En recevant le 30 juillet le ministre saoudien des Affaires étrangères, Faisal bin Farhan Al Saud, le président Saïed a salué de son côté « le soutien indéfectible du royaume » qui s’est dit prêt à subvenir aux besoins immédiats de la Tunisie. Un soutien critiqué sur le plan national tunisien par les détracteurs du forcing constitutionnel en cours qui estiment qu’il n’est pas dans l’intérêt du pays de rompre avec sa tradition de non alignement dans les axes géopolitiques arabes et étrangers.