Miné par les scandales, Nidaa Tounes ternit l’image du pouvoir
« Durant les cinq dernières années, nous avons vécu une crise des valeurs, une crise éthique », avait déploré Youssef Chahed lors de son discours de politique générale, parlant des Tunisiens en général durant la phase post révolution. Mais à voir les scandales en tous genres qui éclaboussent ces derniers jours son parti Nidaa Tounes, difficile de ne pas se dire que charité bien ordonnée commence par soi-même…
Youssef Chahed a décidé de revoir à la baisse les salaires des ministres de son gouvernement, apprend-on aujourd’hui lundi 5 septembre. Effet d’annonce ou pas, la mesure passe quasi inaperçue, au moment où les affaires de mœurs et de corruption agitent la toile en Tunisie. Des scandales quasi quotidiens qui ont décimé le parti en moins d’une semaine.
Au sommet de l’Etat d’abord, une vidéo a fait surface ce weekend où l’on peut voir des dirigeants de Nidaa Tounes fin 2014, fêtant la victoire de Béji Caïd Essebsi à l’issue de la soirée électorale, aux cris orduriers de « Marzouki ***** ta mère ! », un chant vulgaire issu des stades de football et adapté pour l’occasion. Parmi les protagonistes sautillant en chantant, l’actuel chef du gouvernement Youssef Chahed, ainsi que Rim Caïd Essebsi, l’épouse de Hafedh Caïd Essebsi le fils du président de la République et chef du parti, Slim Azzabi actuel chef du cabinet du président, la députée Wafa Makhlouf, le lobbyiste Karim Barketallah, etc.
Le parti de Moncef Marzouki Alirada n’a pas jugé bon de répondre à la polémique « par respect à la mère décédée de l’ancien président de la République ».
Depuis hier dimanche 4 septembre, c’est la jeune députée Nidaa Tounes Sabrine Goubantini (28 ans) qui se trouve au cœur d’une tempête médiatique. La police a en effet arrêté la veille un agent de sécurité de l’hôtel Yadis à Djerba suite à un litige survenu avec la jeune femme. Selon l’agent, il a simplement tenté d’interdire à la députée de se faire accompagner par son ami non résident de l’hôtel à sa chambre. S’n est suivie une escalade verbale où l’élue est accusée d’abus de pouvoir, menaçant l’agent de représailles en sa qualité de « députée jouissant de l’immunité ». Cela aurait pu n'être qu'un fait divers, mais symboliquement, l'affaire attise le ressentiment autour du thème d'une dignité bafouée.
Selon des témoins sur place, eux-mêmes ainsi que les caméras de surveillance attestent de la véracité de la version de l’agent qui affirme ne pas avoir agressé la députée. Les agents de sécurité de l’hôtel en colère (photo ci-dessus) ont observé suit à cela un sit-in de protestation devant le poste de police suite à l’arrestation de leur collègue, et ont obtenu gain de cause, le gardien ayant été libéré lundi matin.
Vendredi 2 septembre, c’était au tour de Sofiène Toubel, chef du bloc parlementaire Nidaa Tounes, d’être dans la tourmente. Proche d’un ancien clan rival dans le parti, le site Acharaa Al-Magharebi a publié une info selon laquelle Toubel aurait touché un pot-de-vin de 10 mille dinars d’un officier militaire membre du parti, en vue d’obtenir un coup de main pour sa fille au concours de la magistrature.
Fin août enfin, le journal marocain Assabah rapporte que la police marocaine a procédé à l’arrestation d’un jeune homme marocain pour avoir filmé un député tunisien « dans une situation intime » et ce à travers l’option vidéoconférence sur les réseaux sociaux. D’après ce même quotidien, le jeune homme est accusé d’avoir exigé une somme d’argent exorbitante du député tunisien, tout en le menaçant de mettre en ligne la vidéo. Renseignement pris, il s’agit de l’élu Hassan Amari, membre de la Commission parlementaire de la réforme administrative, de la bonne gouvernance, de la lutte contre la corruption et du contrôle de la gestion de l’argent public…
Hier dimanche 4 septembre, face à la multiplication d’affaires de ce type, des députés du bloc parlementaire ont dans un communiqué menacé de poursuites judiciaires les médias instigateurs selon eux d’une « campagne méthodique » contre leur parti. « Absurde » selon la blogosphère, qui rappelle que les campagnes féroces contre l’ancienne troïka avaient mobilisé bien plus de ressources médiatiques.
S.S