Tunisie. L’opposante Abir Moussi placée en détention

 Tunisie. L’opposante Abir Moussi placée en détention

Abir Moussi

La cheffe du Parti destourien libre (PDL), Abir Moussi, l’une des principales formations de l’opposition, a été placée en détention provisoire, mardi soir 3 octobre, après avoir été arrêtée devant le Palais présidentiel. Pour ses détracteurs, cette figure controversée égérie de la nostalgie de l’ancien régime Benaliste a surtout réussi un coup médiatique.

Si l’avocat de son parti, Naoufel Bouden, affirme que les raisons de cette arrestation restent pour l’heure inconnues, d’autres sources affirment que la confiscation des téléphones du staff de Moussi indiquerait que cette dernière, habituée des provocations en tout genre dans l’espace public et l’ancien Parlement dissout, n’a pas obtempéré à l’ordre de ne pas filmer le pourtour hautement sécurisé du palais.

 

Dans cette vidéo, filmée quelques minutes avant son arrestation, Abir Moussi affirme que le bureau d’ordre de la présidence a « illégalement » refusé d’accepter son recours contre des décrets présidentiels et de lui remettre un accusé de réception

Seule certitude, Abir Moussi a bien été arrêtée devant le palais présidentiel de Carthage, où elle était venue déposer, d’après ses dires, des recours contre des décrets présidentiels, plus précisément contre le nouveau découpage en districts du pays qui vise selon l’opposante elle aussi candidate officieuse à la prochaine présidentielle à favoriser davantage encore l’agenda électoral du président Saïed.

 

Une stratégie payante

Unanimes, des membres du PDL ont aussitôt dénoncé un « véritable enlèvement ». Ancienne députée, Moussi est une farouche opposante au président Kais Saïed mais surtout une éradicatrice décomplexée des islamistes d’Ennahdha dont Saïed constitue à ses yeux un faux adversaire.

Avocate en 2011 du RCD dissout, et revendiquant l’héritage de l’ex-président Zine El-Abidine Ben Ali, renversé lors de la première révolte du printemps arabe, elle est accusée par la gauche de chercher à réinstaurer en Tunisie une nouvelle dictature fasciste, et par l’ancienne garde destourienne bourguibiste d’être « une fausse alliée du bourguibisme ».

Depuis février dernier, les autorités ont incarcéré plusieurs opposants, dont le chef historique d’Ennahda, Rached Ghannouchi, ainsi que des anciens ministres et des hommes d’affaires. Le président Saïed, accusé par l’opposition de dérive autoritaire, a qualifié les personnes arrêtées de « terroristes », affirmant qu’elles étaient impliquées dans un « complot contre la sûreté de l’Etat ».

En perte de vitesse dans les sondages après y avoir longtemps occupé le top 3 des personnalités politiques les populaires du pays, ignorée par l’actuel pouvoir, Abir Moussi a pour de nombreux observateurs obtenu ce qu’elle voulait : harceler la présidence de la République jusqu’à se faire arrêter de sorte de revenir au premier plan et de ne pas rester en marge de la militance anti Saïed.