Tunisie. Limogeage du chef du gouvernement en poste depuis 7 mois

Sarra Zaâfrani a aussitôt été désignée pour succéder à Kamel Maddouri
Le président de la République, Kais Saïed, a brusquement décidé jeudi 20 mars 2025 de limoger le chef du gouvernement, Kamel Maddouri. L’annonce n’a été faite que le lendemain dans un communiqué présidentiel publié à l’aube, ce vendredi 21 mars, à 5h33 du matin. Maddouri n’était en poste que depuis le 7 août 2024.
Son prédécesseur à ce poste éphémère désormais qualifié de « siège éjectable » par les internautes, Ahmed Hachani, n’avait pas lui non plus réussi à boucler une année en fonction. C’est Sarra Zaâfrani Zanzri, ministre de l’Équipement et de l’Habitat, a été nommée cheffe du gouvernement pour lui succéder.
Elle est ingénieure de formation, spécialisée en aménagement territorial. Une technicienne sans profil politique qui sied donc visiblement à ce poste au sein de l’actuel régime hyper présidentialiste. Salah Zouari, directeur général des Ponts et Chaussées, a quant à lui été nommé nouveau ministre de l’Équipement.
Lors de son premier entretien avec sa nouvelle cheffe de gouvernement, Kaïs Saïed a particulièrement insisté sur « la nécessité de renforcer la coordination de l’action gouvernementale et de lever tous les obstacles afin de répondre aux attentes du peuple tunisien ».
Accusation à peine masquée de complot
Fait inédit s’agissant de la très taciturne communication présidentielle, cette fois la révocation du chef du gouvernement s’accompagne de la tenue d’un Conseil de sécurité nationale en présence de généraux de l’armée et du chef du gouvernement lui-même. Publiée également à l’aube, la vidéo ci-dessus d’une demi-heure documentant ledit Conseil renseigne de manière évasive sur les raisons de la brutale éviction.
Dans cette longue tirade, le chef de l’Etat procède dans un premier temps à un rappel historique des évènements post révolution de 2011, en établissement un parallèle avec le 20 mars 1956, date de l’indépendance de la Tunisie commémorée hier jeudi, tout en évoquant le rôle joué à diverses étapes clés de l’histoire du pays par la Kasbah, siège du gouvernement, « objet de toutes sortes de convoitises de la part de lobbies agissant dans les arcanes obscures ». Des lobbies dont nul ne connaît l’identité exacte.
L’accusation est clairement lancée, sans nommer Kamel Maddouri, lorsque Saïed énumère ce qu’il estime être les négligences et les complots « ourdis contre le peuple tunisien » : il cite pêle-mêle les récentes immolations par le feu de jeunes chômeurs, actes filmés à dessein selon le président pour déstabiliser le pays, ou encore les pénuries « concomitantes avec le procès pour complot contre la sûreté de l’Etat » où comparaissent depuis le 4 mars dernier plusieurs figures de l’opposition.