Tunisie. Liberté d’expression : les Etats-Unis haussent le ton
Lors d’une conférence de presse tenue jeudi soir 7 octobre, le porte-parole du département d’Etat américain, Ned Price, a déclaré que les Etats-Unis sont préoccupés par le recours en Tunisie à la justice militaire pour instruire des affaires civiles.
Signe de l’importance de l’actuel dossier tunisien pour le State Department, cet ancien officier du renseignement consacre l’introduction de ce briefing à deux éléments en tête de l’ordre du jour : la nomination d’une envoyée spéciale chargée des droits de l’homme et des minorités, puis les nouvelles en provenance de Tunisie.
Le département d’État des USA se dit « préoccupé et déçu par les récents rapports faisant état d’atteintes à la liberté de presse et d’expression, ainsi que la saisie de tribunaux militaires dans des dossiers civils », poursuit-il.
« Il est essentiel pour le gouvernement tunisien d’honorer son engagement à respecter les droits humains comme stipulé dans la Constitution et affirmé dans le décret présidentiel 117 », précise Price, qui en évoquant jusque dans le détail ce volet juridique démontre que son administration suit de très près les récents développements en Tunisie.
Nous exhortons également le président tunisien ainsi que la nouvelle cheffe du gouvernement à répondre rapidement à l’appel du peuple tunisien pour une feuille de route claire permettant le retour à un processus démocratique et transparent qui impliquerait la société civile et un pluralisme politique » a-t-il réitéré avant de laisser la place aux questions des journalistes présents.
Le 3 octobre dernier, l’animateur de la chaîne de télévision Zitouna TV, Ameur Ayed, a été arrêté à son domicile. Il est incarcéré avant de comparaître devant la justice militaire notamment pour « appel à la rébellion ».
Audition spéciale au Congrès US
Dans une semaine, le jeudi prochain 14 octobre 2021, rappelons que la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants américains a planifié par ailleurs une audition consacrée à « l’examen de l’état de la démocratie en Tunisie » et aux « prochaines étapes de la politique américaine » à l’égard du pays.
Organisée suite aux efforts de lobbying d’élus américains Démocrates dirigés par le sénateur Chris Murphy, cette audience plénière intervient après que ce dernier ait exprimé sa « désillusion » sur les réseaux sociaux après ce qu’il a considéré comme un manquement du président Kais Saïed à sa parole au lendemain de la visite d’une délégation US à Tunis. Son objectif est de requérir du président américain Joe Biden des « mesures plus dissuasives contre tout travail de sape de la démocratie » dans cette région du monde.
En recevant hier soir jeudi Salah Sayel, président du Conseil tunisien des marchés financiers, le président Saïed s’est livré à une diatribe contre les agences internationales de notations financières, leur reprochant de ne pas prendre en compte le contexte économique mondial post-pandémie : « Nous sommes un Etat souverain […] Nous ne sommes pas leurs élèves et ils ne sont pas nos maîtres, ils n’ont pas à donner une note en fonction de leur bon vouloir », a-t-il affirmé.
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