Les propos du porte-parole de la droite néolibérale provoquent un tollé

 Les propos du porte-parole de la droite néolibérale provoquent un tollé

Walid Sfar


Un statut du porte-parole de l’un des partis de la coalition au pouvoir, Afek Tounes, ont déclenché une vague d’indignation sur la toile. Face à la crise, Walid Sfar appelle de ses vœux l’instauration d’une « dictature républicaine » d’une année renouvelable…




 


Lundi soir 4 juillet, Walid Sfar (36 ans) postait sur Facebook le statut suivant :


 


« Notre plus grande priorité en Tunisie est de rétablir la force de la loi et sauver ce qui reste de l'état. Pour ça, Je pense que nous devons adopter la solution romaine : la dictature républicaine.


"Dictateur: (dictàtôris, ôris) est, durant la république romaine, un magistrat extraordinaire qui détient les pleins pouvoirs (imperium) pour un mandat qui ne peut, à l'origine, excéder six mois.


Les Romains l'instaurèrent dès la première décennie de la République pour gérer une situation d'urgence le plus efficacement possible, après un désastre militaire ou durant une crise politique interne par exemple. Le dictateur est nommé par un des deux consuls en exercice après que le Sénat a approuvé le principe de la dictature.


Les deux missions du dictateur, d'ordre civil et militaire, revêtent la même importance aux yeux des Romains." Wikipedia


Conclusion 1: En république, la dictature est un outil parfois nécessaire à la démocratie pour rétablir l'ordre en période de chaos à condition de mettre les gardes fous nécessaires. Sans ordre, une démocratie ne peut être ni efficace ni effective.


Conclusion 2 : Comme nous vivons une situation comparable à celle décrite plus haut, nous pouvons et pour une période de 12 mois renouvelable une fois nommer un "dictatoris" au sens romain avec une seule et unique mission : Faire appliquer la loi ! »


 


Suicide politique en direct


Depuis, le jeune politicien a tenté une mise au point qui n’a pas suffi à calmer les esprits, en estimant que ses propos correspondent à « une réflexion personnelle » qui n'engagent que sa personne et « en aucun cas le parti » dans lequel il exerce des responsabilités. Or, cette distinction est généralement problématique lorsque l’on endosse le porte-parolat d’une quelconque institution.


Sur Twitter, ses propos sont devenus « the talk of the town ». Dans l’avalanche de commentaires suscités par le statut (près de 200 en moins de 24 heures), un vif débat s’est engagé. « Depuis quelques semaines, je regrette chaque jour d'avoir voté pour Afek. Mais là, là, j'ai carrément envie de me jeter par la fenêtre.Je pense qu'il est important de lire le discours sur la servitude volontaire d'Etienne de la Boétie », s’indigne ainsi l’activiste et ancienne présidente de l’ONG Bawsala Amira Yahyaoui.


« Tu as tout a fait raison. La preuve : le monde arabe est géré par des "Dictateurs (dictator, -oris)" qui renouvellent leur mandat pour faire respecter la loi », ironise Kamel Tlili.


D’autres internautes, plus facétieux encore, ont détourné des portraits de Julius César, « candidat Afek circonscription Italie 1 ».  


 


La nouvelle et décomplexée droite tunisienne


Sur une note plus sérieuse, dans un pays marqué par plus d’un demi-siècle de dictature, il n’est pas étonnant que les propos de Sfar mettent en émoi une partie des Tunisiens. La prévalence des réactions de rejet constitue en revanche plutôt une agréable surprise : elle révèle une jeune génération aussi vigilante que mature, immunisée, qui sans nécessairement conceptualiser les relents autoritaires de la néo droite éprouve une aversion viscérale à l’égard de toute forme de tutelle.


Fin 2014, le parti Afek Tounes, réputé être celui de l’«ATUGE » et des compétences des grandes écoles, avait déjà appelé à voter Béji Caïd Essebsi lors de la présidentielle, ce qui avait résulté en quelques démissions parmi les cadres du parti. En porte-à-faux par rapport à l’esprit de la nouvelle Constitution, aujourd’hui la présidence de la République est en passe de concentrer toutes sortes de pouvoirs.  


Encore en pleine genèse, le paysage politique tunisien s’éclaircit peu à peu. Sociétalement progressiste, mais fiscalement conservatrice, la droite moderniste tunisienne conserve de façon classique une attitude favorable à l’ordre et « la loi », sans en remettre en question le caractère juste ou injuste, notamment dans son soutien au projet de loi de réconciliation économique.     


Quant aux réseaux sociaux, comme on dit outre-Atlantique, they will make you or break you.


 


S.S