Tunisie. Les présumées tentatives d’assassinat : un marronnier politique

 Tunisie. Les présumées tentatives d’assassinat : un marronnier politique

Kais Saïed présidait vendredi la cérémonie de célébration du 66ème anniversaire de la création de l’Armée nationale

Le ministère de l’Intérieur a annoncé lors d’une conférence de presse ce vendredi 24 juin que le président de la République, Kais Saïed, serait visé par des plans touchant à son intégrité physique.

« Ces menaces sont bien réelles », insiste le ministère de l’Intérieur. Il s’agit de plans d’assassinat, a réitéré sans plus de détails la nouvelle porte-parole du ministère de l’Intérieur, Fadhila Khalifa. Elle a annoncé à la mi-journée lors d’un point presse qu’un plan terroriste a été avorté, hier jeudi, « déjoué par des unités des services de sûreté », après d’interminables remerciements des médias au point que ces derniers la prient d’entrer dans le vif du sujet. Les journalistes n’ont par ailleurs pas été autorisés à poser de questions.

La même source indique que l’élément terroriste serait « un loup solitaire » qui « prévoyait d’attaquer plusieurs institutions sensibles dans la capitale ». L’individu en question aurait été arrêté rapidement interpellé, après qu’il ait tenté d’attaquer deux policiers. Il venait de sortir de prison en 2021. L’arme du crime a été saisie.

 

Vers une politisation de l’enquête ?

Mais dans la même journée de vendredi, l’ancien chef de gouvernement et ex dirigeant d’Ennahdha, Hamadi Jebali a été arrêté pour la deuxième fois en deux mois, cette fois suite à l’ouverture d’une enquête sur un financement suspect d’une association appelée « Annamaa Tounes », sur instruction du ministère public au Pôle antiterroriste. Etant donnée la tournure que prend l’enquête, les autorités sécuritaires semblent donc se contredire, puisqu’il n’y a plus lieu de parler de loup solitaire si d’autres parties sont impliquées, et a fortiori une vaste organisation, sauf à verser dans l’incohérence.

Ainsi lors de la même conférence de presse, Khalifa a expliqué que « d’importants mouvements bancaires et montants financiers ont été versées à des membres actifs », et que cela « n’est pas conforme à l’activité et à la vocation caritative d’une telle l’association ».

Se basant sur les rapports d’enquête de la Banque centrale de Tunisie, le ministère de l’Intérieur a par conséquent ouvert une enquête qui a permis l’arrestation de trois individus, dont Jebali, officiellement retraité, gérant d’un atelier de fabrication de chaudières dans sa région natale de Sousse. Les domiciles des suspects et le siège de l’association ont été perquisitionnés. Des ordinateurs et du matériel électronique ont été saisis ainsi que les documents bancaires en relation avec des financements étrangers et un présumé blanchiment d’argent, explique le ministère.

Dans la foulée de la conférence, l’opposant de gauche radicale Hamma Hammami a demandé aux autorités d’« arrêter de prendre les Tunisiens pour des idiots, tout en exigeant des preuves de ces allégations ».

Ce n’est pas la première fois qu’en l’espace de 2 ans, le Palais de Carthage se dit l’objet de tentatives d’assassinat, à tel point qu’une partie de la presse nationale n’y prête plus vraiment attention. Faute de preuves, une affaire de tentative d’assassinat par l’empoisonnement du pain du président Saïed, avait été classée sans suite, en juin 2021. En janvier de la même année, Nadia Akacha, l’ancienne directrice de cabinet présidentiel, avait été brièvement hospitalisée après avoir manipulé « un courrier suspect » selon la version de la présidence. Là encore, affaire classée, avant que la même Akacha ne soit poussée à la démission quelques mois plus tard.