Le SNJT agite la menace d’une grève générale
Le syndicat national des journalistes tunisiens dit envisager la possibilité de déposer plainte contre le chef du gouvernement et de « mener toutes les formes de lutte possibles », y compris la grève générale.
L’avertissement du syndicat des journalistes interviennent au lendemain de décisions prises le 6 mai par la présidence du gouvernement à l’issue d’un conseil ministériel restreint consacré au secteur de l’information, en marge de la crise Covid-19. Des mesures qualifiées par le SNJT d’« unilatérales » et « improvisées ».
Selon la présidence du gouvernement, il a été décidé que l’Etat prenne en charge 50% des frais de diffusion pour l’année 2020 de l’ensemble des chaines radio et télévisées privées. L’Etat et les établissements publics s’engageront également à s’abonner aux versions électroniques des journaux à hauteur d’un budget de 1,2 million de dinars.
Par ailleurs un fonds de 5 millions de dinars sera créé auprès de la présidence du gouvernement pour le soutien de l’effort communicationnel de l’Etat en matière de campagnes de sensibilisation. Une somme de 5 millions de dinars relevant du budget de l’Etat sera aussi mobilisée pour financer le programme de mise à niveau du secteur et l’appuyer « en vue d’une meilleure intégration dans la transition digitale ».
Soupçons de « publicité politique » et négligence de la presse écrite
Mais le syndicat n’entend pas y coopérer. Ainsi le SNJT a annoncé avoir constitué « une commission juridique » chargée d'examiner la possibilité de porter plainte contre le chef du gouvernement, sur fond de « suspicion de détournement de l’argent des contribuables à des fins de publicité politique ».
Le syndicat précise qu’il entend mener « toutes les formes de lutte possibles pour défendre les droits des journalistes ». Il invite plutôt le gouvernement à intervenir d’urgence pour faire face à l’impact catastrophique de la pandémie du nouveau coronavirus sur la situation sociale des journalistes mis au chômage technique.
Le SNJT exhorte à assurer le paiement des salaires du personnel des médias saisis par l’Etat après la révolution, à « respecter les engagements pris envers ces établissements et à garantir leur pérennité ».
Il faut « arrêter les initiatives législatives non constitutionnelles qui tendent à mettre la main, par des parties politiques bien déterminées, sur le secteur de l’information » poursuit le SNJT qui appelle à élaborer une politique publique participative pour hâter la reprise du processus de la réforme du secteur de l’information et sauver la presse écrite.
Le syndicat appelle enfin à la mise en place d’un « Conseil de la presse » et à limiter les emplois précaires au sein des établissements de presse publics, tout en comblant la vacance administrative à la tête de l’Agence Tunis Afrique Presse et de la Radio tunisienne, « loin des quotas partisans et des allégeances politiques ».
Dans une tribune publiée hier jeudi par Taoufik Hebaieb, titrée « Gouvernement Fakhfakh, Ne tuez pas la presse écrite ! », le patron de presse regrette que « s’il a eu la main heureuse pour décider une série de mesures salvatrices en faveur des médias, privilégiant cependant l’audio-visuel et le numérique, le gouvernement en a totalement exclu la presse écrite, imprimée, vendue en kiosque et distribuée par la poste. A moins qu’il ne s’agisse d’un premier chapitre dans la mise en place d’un dispositif plus global d’appui aux médias, ce parti-pris porte un coup fatal à l’imprimé qui demeure l’épine dorsale d’une presse professionnelle, libre et indépendante ».