Le président déchu Ben Ali refait parler de lui

 Le président déchu Ben Ali refait parler de lui

Ben Ali et Saber Hamrouni à Riyad


Rédaction de ses mémoires autobiographiques, sit-in de ses nostalgiques à Tunis, volonté de retour et de procès équitable, sondage sur son éligibilité, ou encore rencontre avec un ancien opposant islamiste dans son refuge à Riyad… L’ancien dictateur tunisien Ben Ali défraye récemment de plus en plus la chronique. 



 


C’est d’abord l’ancien militant d’Ennahdha Saber Hamrouni qui a attisé la curiosité de l’opinion publique tunisienne, en publiant sur les réseaux sociaux des photos inédites en compagnie de l’ancien président, prises fin juin dernier, dans sa villa en Arabie Saoudite, avec la mention « bientôt de nouvelles révélations ». Hamrouni explique qu’après de nombreuses tentatives, il a réussi à obtenir cette rencontre aux allures de syndrome de Stockholm, par l’entremise d’un membre de la famille de Ben Ali aujourd’hui encore emprisonné à Tunis.


Cet effet d’annonce de la part d’un ancien prisonnier ayant passé près de 16 années de prison dans les geôles de l’ex régime a attiré l’attention de la chaîne Russia Today qui a invité Hamrouni en duplex.   


 


« Le même sort que Charles 1er ou Marie-Antoinette »


« Je suis allé voir Ben Ali, d’une initiative purement humaine. Je n’aurais pas voulu qu’il lui arrive ce qui est arrivé à Charles 1er et si j’ai croupi 15 ans dans ses geôles, je sais maintenant que ceux qui ont poussé Ben Ali à opprimer et à tuer les islamistes sont les mêmes que ceux qui poussent aujourd’hui à le bannir. Ces actes qui gangrènent les peuples arabes doivent cesser et il faut opter pour la réconciliation » a déclaré l’ancien dirigeant islamiste dans l’entretien ci-dessus accordé le 3 juillet 2018, à RT TV.


Devenu une sorte de porte-parole de l’ancien général, il affirme en outre que Ben Ali est « amer » pour son pays et qu’il était prêt à sortir du silence si les conditions le permettaient. « Il m’a dit qu’il était innocent, et il l’est jusqu’à ce que sa culpabilité soit prouvée, d’ailleurs aucun organisme international ne l’a condamné. Il m’a parlé de l’affaire du palais de Sidi Dhrif et de l’argent par liasses trouvé sur place. Il m’a dit que c’était un coup monté et m’a cité beaucoup de noms… La vérité doit être connue de tous ! », ajoute-t-il sur le même ton dramatique.


L’ancien dirigeant d’Ennahdha a par ailleurs cru bon de rappeler que la famille de Ben Ali vit chichement des dons gracieusement octroyés le royaume saoudien, et qu’il était « inacceptable que lui et sa femme aient le même sort que Charles 1er ou Marie-Antoinette. »


 


17% des virtuelles intentions de vote pour la présidentielle de 2019


Si une élection présidentielle avait lieu aujourd’hui et permettait à Zien El Abidine Ben Ali de se présenter, celui-ci récolterait 17% des suffrages. C’est en tout cas ce révèle un sondage en interne qui vient d’être publié par un Institut américain à Tunis sur les candidats favoris des Tunisiens pour la prochaine présidentielle de 2019, rapporte le site mondafrique.com. A noter toutefois qu’aucune personnalité n’était proposée aux sondés qui exprimaient donc leurs réponses en première intention spontanée.


« Sans doute le désir d’ordre et d’autorité qui est très fort aujourd’hui dans l’opinion tunisienne se manifeste-t-il dans cette nostalgie d’un passé largement fantasmé. Sur les réseaux sociaux, ces dernières semaines, apparaissent des sites Facebook appelant au retour en Tunisie de l’ancien président d’Arabie Saoudite, où il est exilé », explique la même source.


Dans le même sondage, Ben Ali est devancé par le chef du gouvernement, Youssef Chahed, celui que l’on qualifie de « Macron tunisien », qui est crédité de 19% des intentions de vote des sondés.


 


Volonté de retour, un souhait fantaisiste ?


« Ben Ali, ancien président de la république, a émis le souhait de rentrer en Tunisie, comme l’avait fait Rached Ghannouchi, en 2011, après son long exil à Londres ».


C’est l’analogie opérée par Me Mounir Ben Salha, avocat de l’ancien dictateur, dans une déclaration à « Al Qods Al-Arabi hier jeudi 5 juillet 2018, rappelant que Ben Ali, exilé en Arabie-saoudite depuis plus de 7 ans, a souligné que le chef du parti islamiste a pu rentrer en Tunisie après la révolution, bien qu’il était condamné à la prison ferme.


L’avocat a également indiqué que Ben Ali a écrit ses mémoires, qui seront publiées à la fin de cet été, où il évoque son parcours, depuis qu’il a été ministre de l’Intérieur, puis Premier ministre et jusqu’au « changement du 7 novembre 1987 ». Il y relate également le conflit entre l’Etat tunisien et le mouvement islamiste, qu’il avait vécu dès le début, dans les années 1970-1980, lorsqu’il était encore directeur de la sûreté nationale.


 


Seif Soudani