Le ministère de l’Intérieur dément l’existence d’une police parallèle
Le porte-parole du ministère de l’Intérieur Sofiène Zaâg dément l’existence de tout « cabinet noir » au sein du département, en réaction aux accusations du collectif de défense des martyrs Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi dont les allégations d’un bureau scellé renfermant des preuves en rapport avec l’assassinat de ces deux hommes continuent d’agiter la scène politique.
Selon Zaâg, toutes les archives et tous les documents administratifs sont conservés selon les réglementations et les lois en vigueur dans l’administration centrale spécialisée dans ce domaine.
Or, selon plusieurs représentants de la gauche radicale dans l’opposition, des preuves à charge auraient été mises sous scellés ou dispersées à dessein, de sorte que l’instruction judiciaire soit dispersée en plusieurs volets, ne permettant pas d’établir la complicité du ministère à l’époque où il était contrôlé par Ennahdha.
« Il n’y pas de chambres noires au sein du ministère de l’Intérieur »
« Les éléments en lien avec l’affaire du dénommé Mustapha Khedher ont été saisis par le ministère de l’Intérieur en coordination avec le ministère public près le Tribunal de première instance de Tunis I », a martelé la même source.
« Le ministère de l’Intérieur se tient prêt à fournir aux autorités judiciaires compétentes tous les documents nécessaires liés à cette affaire, conformément aux réglementaires et lois en vigueur », a-t-il poursuivi. De la « langue de bois », selon le comité de défense de la famille Belaïd.
Ce dernier avait présenté la semaine dernière un ensemble de documents sur la nature de la relation de Mustapha Khedher (qui purge actuellement une peine de 8 ans de prison) avec le Mouvement Ennahdha et ses leaders, ainsi que sur ses activités de renseignements dont il avait la charge. Des enregistrements audio « leakés » attestant de ces activités d’écoute ont été remis aux journalistes dont nous faisions partie.
Découverts fin 2013 au domicile de Mustapha Khedher à el Mourouj dans la banlieue sud de Tunis, « une partie de ces documents se trouvent actuellement dans une chambre noire scellée au ministère de l’Intérieur », selon le collectif de défense qui réclame l’ouverture de cette chambre pour consulter les documents qui s’y trouvent, ou du moins la réouverture d’une enquête à la lumière de ces éléments.
Le parquet ordonne l’ouverture d’une enquête
C’est chose faite depuis hier lundi 8 octobre, date à laquelle le ministère public a ordonné l’ouverture d’une enquête suite aux données fournies par le comité de défense de Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi lors de la conférence de presse du 2 octobre 2018.
Le même parquet avait réagi dans un premier temps en considérant que l’affaire était classée avec l’identification de Kamel Gadhgadhi, exécutant du meurtre de Belaïd, abattu à son tour par un raid des forces spéciales en 2014. « C’est ignorer que les assassinats politiques vont bien au-delà de l’exécutant qui n’est qu’un pion », rappelle l’élu Mongi Rahoui.
Le magistrat et porte-parole du parquet Sofiène Selliti précise que le ministère public a confié le dossier à un juge d’instruction au pôle judiciaire antiterroriste.
Même si la causalité n’est pas établie pour autant par le comité de défense de Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, l’existence d’une structure paramilitaire armée, jouissant d’une logistique sophistiquée, rendait possible son passage à l’acte s’agissant de l’élimination d’adversaires politiques gênants, après qu’il les ait ouvertement diabolisés.
Seif Soudani