Le Conseil du sécularisme cherche sa voie entre conservateurs destouriens et conservateurs islamistes
Véritable OVNI dans la société civile, le Conseil tunisien du sécularisme (CTS) s’est fixé la difficile mission d’œuvrer à séparer le religieux de ce qui relève des libertés individuelles et de lutter contre le poids de certaines traditions liberticides. Les réactions ne se sont pas fait attendre. Les membres du conseil, au premier titre desquels sa présidente Hazar Jhinaoui, disent faire l’objet de nombreuses menaces.
Créé le 13 avril dernier à l’initiative du parti des Démocrates, le Conseil tunisien du sécularisme s’inscrit dans la vision que prône la jeune formation politique. Se revendiquant ouvertement laïc – une première en Tunisie –, le parti défend notamment une vision humaniste de la société et milite pour le respect de la liberté de conscience inscrite dans la Constitution de 2014. La même Constitution fait pourtant de l’islam la religion du pays et donne à l’État le rôle de protéger le sacré. « Peut-on garantir la liberté de conscience alors qu’on interdit de débattre du sacré ? » s’interroge Hazar Jhinaoui, présidente du CTS et porte-parole du parti
Le constat est là : « la Tunisie n’est pas un pays laïc, car elle ne garantit la laïcité ni en droit, ni dans les faits », regrette-t-elle. La Constitution elle-même instaure une discrimination « puisqu’être musulman est une condition sine qua non pour pouvoir présenter sa candidature à la présidentielle », ajoute Mme Jhinaoui.
C’est dans ce contexte que le CTS, qui disposera d’un observatoire, s’est fixé pour mission de lutter contre toute forme de discrimination et de promouvoir une « société égalitaire et démocratique ». Outre des membres des Démocrates, le conseil réunit « des personnalités indépendantes (juristes, intellectuels) et des membres de la société civile », explique la présidente, sans pour le moment citer de noms.
Le but est donc de propulser la société tunisienne dans une nouvelle ère. « Nous n’avons pas à choisir entre conservateurs destouriens et conservateurs islamiques ; ce n’est pas une fatalité », veut croire Mme Jhinaoui. Pour le moment, le CTS ne compte pas que des partisans. « Réactions hostiles et menaces de mort sont notre pain quotidien », assure-t-elle, en ajoutant ne pas être intimidée.
Rached Cherif