Tunisie. La campagne des législatives théâtre de toutes les excentricités
Soyons clairs, toutes les campagnes électorales, y compris dans la Tunisie post 2011, ont eu leur lot de candidatures toutes plus excentriques les unes que les autres. Mais la décision présidentielle d’écarter les listes du scrutin des législatives du 17 décembre prochain, désormais non plus proportionnel mais majoritaire uninominal, a eu pour effet de mettre le focus sur des individualités.
Ajoutez-y le boycott massif, hormis le parti panarabiste Achaâb, de l’ensemble de la classe politique tunisienne, diabolisée par le Palais au profit d’une supposée vertueuse Tunisie d’en bas, et vous obtenez de nouvelles figures inconnues au bataillon, « de 3ème, 4ème , voire de 5ème rang ». Les réseaux sociaux s’en amusent, hilares depuis le coup d’envoi fin novembre de la campagne officielle. Un processus qui indiffère la plupart des Tunisiens, si ce n’est les bizarreries les plus loufoques de certains aspirants au futur Parlement pour attirer l’attention.
Le Grand Bêtisier
« Ne croyez pas que la Tunisie profonde soit la seule à produire des illuminés selon les standards des citadins. La Marsa a aussi son contingent de candidats aux législatives venus faire le spectacle ! », prévient un internaute commentant la tenue de Mohamed Ali Bouaziz, candidat pour un siège représentant la circonscription Carthage – la Marsa, venu de rouge vêtu faire le show à cheval, en tenue de carnaval de chevalier traditionnel.
Les détracteurs de ce candidat, dont le fils du député martyr Mohamed Brahmi assassiné par des djihadistes, rappellent par ailleurs que Bouaziz est un proche des milieux islamistes ultra radicaux et qu’il a déjà brandit la bannière noire de l’Etat islamique.
Mais il y a aussi la mégalomanie de l’un des candidats pour la circonscription de Béja, qui a sillonné la ville du nord – ouest à la façon d’un Bourguiba, du haut du toit ouvrant d’un SUV dernier cri, entouré de gardes du corps loués pour l’occasion. « S’il devient député, il descendra probablement dans l’hémicycle en hélicoptère », ironise-t-on sur la toile.
Il y a également « l’instagrameuse », qui selon les habitants d’Ezzahra dans la banlieue sud de Tunis qu’elle compte représenter « confond Tiktok et campagne électorale » :
Au Bardo, les riverains ont en outre été témoins de la montée des petits commerçants locaux qui, face à la désertification du champ politique classique, aiguisent leurs aspirations législatives, à l’image d’Anis Mejri, un candidat qui ne tarit pas d’éloges sur ses propres qualités.
Devant cet insolite florilège, nombreux sont les Tunisiens qui implorent l’exécutif de ne pas rompre avec les habituels débats télévisés des sessions plénières de l’Assemblée, retransmis par la TV nationale, qui promettent dans cette édition d’être hauts en couleurs, même si ce futur Parlement a été considérablement délesté en termes de prérogatives par la nouvelle Constitution du 25 juillet 2022.
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