« L’élection d’Emmanuel Macron est un soulagement ! »
Unanimement bien accueillie, l’élection d’Emmanuel Macron 8ème président de la Vème République française animait encore les réseaux sociaux tunisiens tout au long du lundi 8 mai. Le jeune âge du pas encore quadragénaire ou encore l’âge avancé de sa femme Brigitte, s’ils sont récurrents, sont loin d’être les seuls sujets de prédilection.
Sur la photo du service communication de la présidence illustrant les félicitations officielles de Béji Caïd Essebsi à son nouvel homologue français, le contraste est saisissant entre le visage ridé du nonagénaire et celui du fringant jeune premier Emmanuel Macron, paradoxalement présidents respectifs du pays de la « révolution de la jeunesse et de la dignité » et de la vieille démocratie France…
On se souvient qu’en marge de la marche contre le terrorisme en mars 2015 en hommage aux victimes du Bardo, Béji Caïd Essebsi avait confondu François Hollande avec François Mitterrand, gageons que cette fois le jeune âge du fraîchement élu président français devrait le distinguer de ses prédécesseur.
Sur les plans économique et financier, le dinar tunisien était en légère convalescence depuis l’intervention de la Banque centrale tunisienne, qui dans la foulée du limogeage de la ministre des Finances avait injecté fin avril 100 millions de dollars sur le marché pour atténuer le glissement de la monnaie nationale.
Mais voilà que l’euro jubile à l'annonce de la large victoire de Macron et a à nouveau repris du poil de la bête dès dimanche soir face aux autres monnaies. Conjuguée à l'inflation galopante (plus de 5% à selon le dernier bulletin de l'INS publié vendredi) à l'approche du ramadan, cette situation résulte déjà en un dinar qui sombre encore davantage face à l’euro. Cela signifie que la classe moyenne tunisienne va devoir oublier les produits de luxe et autres produits issus de l’importation.
S’agissant de la géopolitique, le choix de la pyramide du Louvre clou du spectacle en background derrière Macron, n’a pas aidé à juguler les théories conspirationnistes sur les liens du « candidat du système » avec les Illuminatis (sic) et autres Rothschild. Ainsi pour l’intellectuelle nationaliste Olfa Youssef, Macron est « le candidat des lobbies sionistes, des multinationales, et des Frères musulmans qui sont tous sur une même ligne » (sic).
Plus sérieusement, encore inconnu du monde il y a quelques mois, Emmanuel Macron fait son entrée dans le club des grands et va effectuer ses premiers pas sur une scène internationale minée par les conflits et les tensions. Interrogé récemment sur le nouvel impérialisme russe, Macron avait froidement répondu : « Je ne fais pas partie de ceux qui sont fascinés par la force. Je ne suis pas fasciné par Poutine (…), je ne fais pas l'objet d'intimidation ». Avant de promettre un "dialogue exigeant" avec Moscou sur les sujets ukrainien et syrien.
Géopolitiquement pragmatique, Macron avait pourtant déclaré en janvier 2017 que « Faire de la destitution d’Assad un préalable à tout a été une erreur ».
L’élection d’un pragmatique également sur les plans économique et migratoire rassure quoi qu’il en soit en Tunisie ceux qui ont des proches expatriés en France et en Europe. « Si Le Pen passe on va tous se serrer dans l’avion. Si Macron passe, on va tous se serrer la ceinture », selon une boutade désormais célèbre au Maghreb.
Seif Soudani