Inédits, les débats télévisés de la présidentielle déjà contestés

 Inédits, les débats télévisés de la présidentielle déjà contestés

Image du tirage au sort effectué sous l’égide de l’ISIE


C’est une première dans l’histoire de la jeune démocratie tunisienne : la TV nationale va diffuser en direct à partir du 7 septembre courant trois débats télévisés opposant les 26 candidats à la présidentielle, sous le contrôle de l’Instance indépendante pour les élections (ISIE) et de la haute autorité indépendante pour l’audiovisuel (Haica), ainsi que le concours de l’ONG « Munadhara ». Une configuration similaire à celle des grandes démocraties occidentales, mais dont les modalités d’organisation sont contestées par l’une des candidates. 



 Le "groupe 2" surnommé "groupe de la mort" par les internautes


 


On se souvient qu’en 2014, le candidat Béji Caïd Essebsi avait refusé tout débat télévisé contre Moncef Marzouki, au point que la campagne télévisée de ce dernier avait fait de la nécessité d’un débat un argument de campagne, allant jusqu’à provoquer en duel le candidat de Nidaa Tounes via un affichage urbain, en vain.


Mais à une époque contemporaine où même les primaires au sein des grands partis politiques font désormais l’objet de débats télévisés à grande audience dans certains pays, l’exercice semblait inévitable pour toute démocratie digne de ce nom.


La Télévision nationale tunisienne a ainsi publié les résultats du tirage au sort des débats du premier tour de l’élection présidentielle, qui se dérouleront sur 3 soirées, samedi 7, dimanche 8 et lundi 9 septembre.


 


Trois groupes distincts


Comme cela se fait aux Etats-Unis en vue des présidentielles en vue desquelles concourent un grand nombre de prétendants, les candidats ont été divisés en trois groupes, dont deux de 9 candidats et un groupe de 8 candidats.


Particulièrement relevé, le débat du premier groupe opposera quelques grands favoris, notamment le candidat d’Ennahdha Abdelfattah Mourou, Mehdi Jomaa l’ex Premier ministre technocrate qui se veut le chantre d’un « nouveau système », mais aussi l’ancien président de la République provisoire Moncef Marzouki. Au programme de ce même débat, Abir Moussi, candidate de la nostalgie à l’ancien régime ou encore Nabil Karoui, toujours incarcéré à l’heure qu’il est, et dont la défense attend de la justice aujourd’hui mardi une réponse à une requête de libération.  


Aussi surprenant que cela puisse paraître, l’ISIE, via sa membre Hasna Ben Slimane, a d’ores et déjà avancé que l’Instance n’est pas opposée à une participation de Nabil Karoui au débat, tout en ne se prononçant pas sur la faisabilité de la chose, laissant le candidat trouver une issue judiciaire à cela, au nom de l’égalité des chances. De là à imaginer un duplex live en direct du centre pénitentiaire de la Mornaguia, il y a un pas que le bon sens de chacun ne pourrait pas franchir.


Autres grands noms de ce « groupe de la mort » : Mohamed Abbou ex ministre de la Réforme administrative, Néji Jalloul, ex ministre de l’Education, Abid Briki ex ministre de la Fonction publique, et Amor Mansour, ex ministre de la Justice.


Le « groupe 2 » sera quant à lui composé du ministre de la Défense Abdelkrim Zbidi, le fondateur de Machrou Tounes Mohsen Marzouk, le radical de gauche Mongi Rahoui, l’ex ministre des Finances Elyes Fakhfakh, le candidat populiste Hechmi Hamdi, le mois connu des candidats Sghaier Ennouri, l’ex Premier ministre Hamadi Jebali, le chef de l’UPR Lotfi Mraihi, et l’indépendant ex Ennahdha Hatem Boulabiar.


Le dernier groupe comptera dans ses rangs le juriste Kais Saied, l’homme d’affaires considéré comme étant en fuite à l’étranger Slim Riahi, l’écrivain panarabiste Safi Said, le radical de gauche Hamma Hammami, l’avocat pro salafiste Seif Eddine Makhlouf, l’ex ministre de la Santé Said Aïdi, l’ex ministre du Tourisme Selma Elloumi, et le chef du gouvernement sortant Youssef Chahed.


 


Dépôt de plainte au Tribunal administratif


Mais une menace de suspension plane sur ces débats depuis que la candidate Abir Moussi a protesté contre le calendrier mis en place par l’ISIE et la TV nationale suite au tirage au sort.


Le 1er septembre, Moussi a convoqué une conférence de presse pour remettre en question la crédibilité de l’opération, la qualifiant « d’illégale » et considérant que l’objectif est d’épargner les candidats des grands partis candidats en les favorisant. Ainsi selon la candidate, certains candidats auraient été consultés au préalable tandis que d’autres ont auraient été ignorés.


Autre point de contentieux d’après la candidate : la répartition des candidats aurait été faite en fonction de la représentativité des partis au parlement, en évitant de réunir « les candidats des trois partis au pouvoir » (Ennahdha, Tahya Tounes et Nidaa Tounes, ndlr) dans un même débat télévisé.


Enfin, toujours selon Abir Moussi, la plainte de son parti déposée devant le Tribunal administratif est potentiellement suspensive, du moins si la juridiction en question venait à la juger comme étant recevable.