Gouvernement Fakhfakh : liste définitive et difficultés en vue
C’est fait ! Après un accouchement dans la douleur et plus de trois mois de vacance du pouvoir, Elyes Fakhfakh a rendu sa copie, tard dans la soirée du mercredi 19 février : devront obtenir la confiance de l’Assemblée 33 ministres et secrétaires d’Etat, soit une dizaine de moins que le gouvernement Jemli mis en échec avant lui, mais loin des 25 membres sur lesquels Fakhfakh tablait initialement.
Cette diète, le gouvernement Fakhfakh la doit essentiellement à la suppression de plusieurs secrétariats d’Etats au nom d’une certaine austérité. Jusque-là dernière minute, les tractations entre le quadragénaire chef du gouvernement désigné et les divers partis politiques furent intenses. Jusqu’au bout, Ennahdha a en effet tenté d’inclure Qalb Tounes, le parti de Nabil Karoui, arguant de la nécessité d’un gouvernement d’union nationale, sans succès.
Le parti islamiste en ressort d’autant plus affaibli : non seulement cette requête n’a pas abouti, mais la menace de désistement d’Ennahdha, puis sa réintégration à l’équipe gouvernementale, ajoute à l’image de compromission de la classe politique tunisienne, spécialement dans sa composante conservatrice désormais prête à tous les deals politiciens, quitte à s’allier aux représentants de l’affairisme, pour espérer peser davantage au sein d’une formation hétéroclite qui lui est globalement hostile.
Péché originel
C’est là indéniablement le point faible de cette équipe gouvernementale : à vouloir contenter tout le monde, hormis les trois groupes parlementaires qui en sont exclus (Qalb Tounes, Coalition Karama, et Parti destourien libre), elle part avec un grand handicap qui laisse augurer d’une gouvernance difficile, quand bien même elle obtiendrait les environ 130 sièges prévus.
La cohabitation entre les ténors autoproclamés de l’anti-corruption (Attayar), nationalistes arabes (al Chaâb), l’ancien régime à visage présentable (Tahia Tounes), les islamistes d’Ennahdha et autres indépendants dont certains sociaux-démocrates issus d’Ettakatol, promet d’âpres lendemains, au moment où la plupart des indicateurs économiques du pays sont au rouge.
Ce gouvernement Fakhfakh est en outre déjà sous le feu de virulentes critiques, certains pointant du doigt plusieurs nominations faites selon le copinage, le cousinage et les liens familiaux par alliance, un clientélisme dont la Tunisie peine à se sortir 9 ans après la révolution, ainsi que quelques cas particuliers de soupçons de « normalisation » avec Israël qui planent notamment sur la nouvelle ministre de la Culture.
En attendant l’annonce d’une séance plénière consacrée au vote de la confiance au Parlement attendue pour ce weekend, voici la liste des nouveaux ministres et leurs affiliations respectives :
Ministre de la Défense : Imed Hazgui (indépendant)
Ministre des Affaires étrangères : Noureddine Erray (indépendant)
Ministre de la Justice : Thouraya Jribi Khemiri (indépendante)
Ministre de l'Intérieur : Hichem Mechichi (indépendant)
Ministre des Finances : Mohamed Nizar Yaîche (indépendant)
Ministre de l'Industrie : Salah Ben Youssef (indépendant)
Ministre d'Etat chargé du Transport et du logistique : Anouar Maarouf (Ennahdha)
Ministre des affaires sociales : Habib Kchaou (indépendant)
Ministre des Technologies de communication et de transition numérique : Mohamed Fadhel Kraïem (indépendant)
Ministre de l'Investissement et de la Coopération internationale : Mohamed Slim Azzabi (Tahya Tounes)
Ministre de l'Education : Mohamed Hamdi (Courant démocrate)
Ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche scientifique : Slim Choura
Ministre de la santé : Abdellatif Mekki (Ennahdha)
Ministre du Commerce : Mohamed Mselini (mouvement Al Chaâb)
Ministre de l'Energie, des Mines et de la transition énergétique : Mongi Marzouk (Indépendant)
Ministre auprès du chef du gouvernement chargé de la relation avec le Parlement : Ali Hafsi (Nidaa Tounes)
Ministre auprès du chef du gouvernement, chargé des Droits de l'homme, de la relation avec des instances constitutionnelles et la société civile : Ayachi Hammami (indépendant)
Ministre du tourisme et de l'artisanat : Mohamed Ali Toumi (El Badil Ettounsi)
Ministre des affaires culturelles : Chiraz Laatiri (indépendante)
Ministre des Domaines de l'Etat et des affaires foncières : Ghazi Chaouachi (Courant démocrate)
Ministre des affaires de la jeunesse et du Sport : Ahmed Gaaloul (Ennahdha)
Ministre de la femme, de l’enfance et des personnes âgées : Asma Shiri (indépendante)
Ministre de l'équipement, de l’habitat de l’aménagement du territoire : Moncef Sliti (Ennahdha)
Ministre de l'Emploi et de la formation professionnelle : Fathi Belhaj (mouvement Al Chaâb)
Ministre d’Etat auprès du chef du gouvernement, chargé de la Fonction publique, de la gouvernance et de la lutte contre la corruption : Mohamed Abbou (courant démocrate)
Ministre de l'agriculture, de la pêche et des ressources hydrauliques : Oussama Khriji (indépendant)
Ministre des affaires religieuses : Ahmed Adhoum (indépendant)
Ministre de l'environnement : Chokri Ben Hassen (Tahya Tounes)
Ministre chargé des affaires locales : Lotfi Zitoun (Ennahdha)
Secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'agriculture, chargé des ressources hydrauliques : Aksa Bahri.
Secrétaire d’Etat auprès du ministère des affaires étrangères : Salma Ennaifer (indépendante).
Ministre auprès du chef du gouvernement chargé des grands projets : Lobna Jribi