Sarkozy à Tunis : l’union des deux droites

 Sarkozy à Tunis : l’union des deux droites

Conférence de presse de Nicolas Sarkozy lors de l’hommage aux victimes de l’attentat du musée du Bardo. (Capture d’écran vidéo ShemFm)


Après le Maroc au mois de juin, l’ancien président français Nicolas Sarkozy est en visite à Tunis pour rencontrer notamment le président Béji Caïd Essebsi, le premier ministre, ainsi que les responsables du parti Nidaa Tounes, équivalent tunisien de son parti, Les Républicains. À Carthage, l’ex-locataire de l’Élysée a particulièrement souligné l’importance de la lutte contre le terrorisme, quelques semaines après l’attentat de Sousse.


 


Tapis rouge pour Sarkozy


La visite de l’ancien président français s’adresse non seulement aux Tunisiens, mais aussi aux Français, auprès desquels il cherche à retrouver sa stature d’homme d’État et à faire oublier les nombreuses procédures judiciaires qui menacent ses ambitions.


Au menu de ce déplacement digne d’un chef d’État en exercice : rencontre avec le président tunisien Béji Caïd Essebsi, mais aussi avec le premier ministre Habib Essid, le président de l’Assemblée des Représentants, ainsi qu’une réunion avec les cadres du parti présidentiel Nidaa Tounes. Le tout dans un cortège d’apparat sous solide escorte policière.


Le rapprochement entre les droites des deux pays est visiblement en bonne voie. Nicolas Sarkozy n’a cessé de vanter son « amitié et son respect » pour le président Béji Caid Essebsi. Une amitié qui tranche avec la fraicheur de la relation entre le président conservateur et le socialiste François Hollande.


 


« Y a-t-il une seule capitale où il n'y a pas de danger ? »


C’est sur la sécurité, thème qui lui est cher, que Nicolas Sarkozy a choisi d’axer sa venue à Tunis. Avec deux attentats meurtriers en quatre mois, le contexte est de ce point de vue plutôt favorable. Favorable aussi, l’écoute de ses sympathisants en France, pour lesquels le souvenir des journées sanglantes de janvier 2015 est encore très présent.


Au Bardo pour saluer la mémoire des victimes de l’attentat de mars 2015, le Français a usé d’une rhétorique guerrière en appelant lundi à appuyer « le combat pour la civilisation contre la barbarie ». Selon lui, « la Tunisie vit des heures très difficiles. Les amis de la Tunisie doivent être ici quand ça va bien ou quand ça va moins bien ». « Y a-t-il une seule capitale où il n'y a pas de danger ? », s’est même interrogé l’ancien chef d’État.


Dans la même logique très droitière que celle de l’exécutif tunisien – qui vient de décréter l’état d’urgence –, l’ancien premier policier de France privilégie une approche totalement sécuritaire de la lutte contre le terrorisme, sans même esquisser un mot sur le développement ou la justice sociale. Pendant ce temps, l’Europe annonce de nouvelles mesures d’aide à l’économie tunisienne.


 


L’épineux dossier libyen


Très attendu aussi sur la Libye où il est accusé d’avoir ouvert la boite de Pandore en intervenant militairement contre le régime de Kadhafi, le patron des Républicains a longuement tenté de réduire la responsabilité française. « On n’a pas été les seuls », a-t-il rappelé devant la mine déconfite de ses lieutenants.


Il a particulièrement insisté sur le rôle de l’ONU, de la Ligue arabe et des 56 pays de la coalition pour éviter que « Benghazi ne soit une ville martyre ». Il n’a pas hésité à comparer la situation de la Libye avec Srebrenica en 1995, où « 8000 musulmans ont été massacrés sans que la communauté internationale ne dise un mot ».


 


La foi du converti


En 2011, alors président, M. Sarkozy a soutenu le régime Ben Ali. Alors que les manifestations étaient quotidiennes dans toute la Tunisie, sa ministre de l’Intérieur, Michèle Alliot-Marie, proposait même le « savoir-faire français » en matière de maintien de l’ordre à son homologue tunisien. Aujourd’hui, l’hôte de la Tunisie semble converti au « Printemps arabe », estimant que c’est parce qu’elle est une jeune démocratie dans le monde arabe que le pays est la cible du terrorisme.


Ironique lorsque son ami Beji Caid Essebsi répétait encore à Paris en avril dernier qu’il « n’y a pas de printemps arabe ». Joignant le geste à la parole, le président tunisien a même lancé son agenda de réhabilitation de l’ancienne nomenklatura accusée de corruption.


Rached Cherif