Fed Cup : Polémique après le match Tunisie – Israël

 Fed Cup : Polémique après le match Tunisie – Israël


Aussitôt sa performance en quarts de finale de l’Open d’Australie achevée, la championne de tennis tunisienne Ons Jabeur s’est envolée pour Helsinki en Finlande pour disputer la Fed Cup où elle a déjà évincé la joueuse israélienne Vlada Katic, sur le score expéditif de 6/4 – 6/0. Mais problème, les autorités tunisiennes condamnent la tenue même de ce match.


« Autoflagellation », « surenchère moraliste », « politisation du sport » ou encore « protestation légitime »… Les réactions fusent dans une Tunisie divisée sur la question.  


Il y a quelques jours, fin janvier, lorsque Ons Jabeur (désormais 45ème mondiale au classement WTA) rentrait au pays, auréolée de son parcours historique dans un tournoi du Grand Chelem pour une joueuse arabe, l’heure était aux solennités et aux superlatifs dans la délégation officielle venue l’accueillir aéroport Tunis-Carthage, présidée par la ministre des Sports en personne, Sonia Ben Cheikh.


Changement de ton soudain hier 5 février, c’est cette fois le ministère des Affaires étrangères, ministère régalien qui dépend directement en Tunisie de la présidence de la République, qui prend la peine de publier un communiqué à charge contre sa propre ressortissante, Ons Jabeur, sans la nommer, ainsi que toute l’équipe de la Fed Cup tunisienne.     


 


Cacophonie gouvernementale


On peut ainsi y lire que « Toute relation, quelle qu’elle soit, avec l’entité sioniste, quand bien même il s’agirait d’une rencontre sportive, est inacceptable ».


Quelque peu surréaliste si l’on considère que le communiqué est émis par une institution étatique d’un pays pour condamner sa propre équipe nationale, et par extension, un autre département gouvernemental (celui des Sports et de la jeunesse), le même texte poursuit : « Cet évènement contrevient aux engagements historiques de la Tunisie vis-à-vis de la cause palestinienne et du peuple palestinien, et ne saurait refléter la position officielle de l’Etat tunisien relative à l’indépendance de l’Etat palestinien ayant Jérusalem pour capitale ».


Disproportionné ? Pas si sûr si l’on on croit les commentaires de certains internautes, plus clivés que jamais sur la question, appelant même à « une punition exemplaire d’Ons Jabeur ». D’autres au contraire se demandent ironiquement si les deux ministères, celui des Sports et celui des Affaires étrangères, mais aussi la présidence de la République de Kais Saïed appartiennent bien au même Etat…


Il faut dire que ce dernier venait il y a quelques jours de critiquer le même ministère des Affaires étrangères, considérant son communiqué contre le « deal du siècle » de Donald Trump « bien faible ». Une situation qui traduit en somme la débandade actuelle au sommet d’un Etat régit par un gouvernement de transition depuis près de 4 mois, censé expédier les affaires courantes.


 


Polarisation du débat


« En quoi boycotter la rencontre aurait-t-il permis de libérer la Palestine ? », se demandent d’autres incrédules, tandis que d’autres rappellent que les autorités tunisiennes traitent avec de nombreuses entreprises israéliennes, et que l’ancien membre de l’ISIE Sami Ben Slama félicite Ons Jabeur pour sa victoire, « qui nous fait un peu oublier les défaites des armées arabes ».     


Si elle prend des proportions inédites, la polémique n’est pas la première du genre en Tunisie. Particulièrement radical et pointilleux sur la question, le nouveau président Kais Saïed avait déjà ordonné une enquête la semaine dernière auprès de la Fédération Tunisienne de Tennis pour vérifier les conditions d’entrée et de participation d’Aaron Cohen, un joueur de tennis portant deux nationalités, dont une israélienne, à un tournoi international qui a eu lieu à Tunis.


Dans d’autres sports individuels, la participation ou non à une compétition face à un athlète israélien est laissée à la conscience des sportifs, mais ceux-ci dépendent souvent des subventions de l’Etat tunisien, surtout à haut niveau.


En attendant de trancher ce très sensible débat de société, la Tunisie a perdu son second match en Fed Cup de tennis l’opposant à Israël, cette fois par Chiraz Bechri face à Lina Glushko, mais la paire Ons Jabeur / Chiraz Bechri a battu la paire Lina Glushko / Shavit Kimchi (7-6, 6-1), ce qui qualifie la Tunisie au tour suivant où elle affrontera la Géorgie.


La Fed Cup, appelée Coupe de la Fédération (en anglais Federation Cup) jusqu'en 1994, est un tournoi mondial de tennis féminin disputé par équipes nationales, considéré comme l'équivalent féminin de la Coupe Davis.