50 000 dossiers déposés auprès de l’IVD
Les victimes avaient jusqu’à ce mercredi 15 juin pour déposer leur plainte auprès de l’Instance Vérité et Dignité, l’organe tunisien chargé de la mission de la justice transitionnelle post dictature. À ce jour, environ 50 000 dossiers ont été déposés et sont en cours de traitement. Une tache hautement symbolique, délicate et difficile pour une instance à laquelle le soutien de l’opinion publique fait défaut face aux attaques de certains responsables politiques.
60 ans d’histoire tunisienne à la loupe
Le mandat de l’IVD court jusqu’en 2018, soit deux ans pour instruire les dossiers avant de transmettre ceux qui seront retenus aux tribunaux. Disparition, torture, violences policières, expropriation, corruption, extorsion : les équipes de l’instance se sont déplacées dans tout le pays pour recueillir les milliers de plaintes. Certains relèvent du processus de justice transitionnelle, mais de nombreux plaignants risquent également d’être déboutés et renvoyés vers la justice civile ordinaire.
En tout état de cause, l’ensemble des 50 000 dossiers sera examiné et traité à temps selon la présidente de l’IVD Sihem Ben Sedrine. Outre leur nombre, c’est parfois leur ancienneté qui ne facilite pas la tâche. Le mandat de l’instance couvre en effet près de 60 ans de l’histoire tunisienne (1955-2013).
Contexte politique difficile
À côté de la difficulté intrinsèque de cette mission, l’IVD fait face aux réticences, voire à l’opposition franche d’une partie de la classe politique. Entre les craintes des personnalités ayant été aux responsabilités dans l’ancien régime et les calculs politiques des nouveaux arrivés, le combat des collaborateurs de Mme Ben Sedrine s’annonce semé d’embuches. « Le bombardement n’a jamais cessé de la part de ceux qui ne souhaitent pas que ce processus existe et qu’il y ait une confrontation par rapport à ce passé. Nous recherchons les crimes de système, pas des règlements de compte à des individus en particulier », a expliqué cette figure de l’opposition à la dictature à RFI.
Alors que le gouvernement a tenté et tente encore de court-circuiter le processus en présentant des projets d’amnistie, l’IVD a reçu un soutien inespéré en la personne de Slim Chiboub. L’homme d’affaires et gendre de l’ancien dictateur impliqué accusé dans plusieurs procédures judiciaires a expliqué en mai 2016 faire confiance à l’instance afin de pouvoir à terme de nouveau « faire face aux Tunisiens lorsqu’il se déplace sur la voie publique »
Rached Cherif