Tunisie. Deux manifestations clairsemées pour commémorer le 14 janvier
Ils n’étaient que quelques dizaines de manifestants à s’être rassemblés mardi 14 janvier 2025, quatorzième anniversaire de la révolution de 2011, respectivement dans deux rassemblements distincts : l’un à la mi-journée, le second en fin de journée. Pour les partisans du pouvoir en place, « c’est bien le signe que le 14 janvier ne fait plus recette ».
Si certains fustigent la démobilisation de cette opposition en ordre dispersé, incapable d’oublier ses désaccords ne serait-ce que le temps d’un rassemblement commun, d’autres estiment en revanche que « l’actuelle opposition muselée, quadrillée par le pouvoir, avec des leaders dont un grand nombre est emprisonné, constitue une cible facile », tempère notamment l’ancien député Sofiène Makhloufi.
Aux abords du théâtre municipal de Tunis, le premier rassemblement, était à l’appel du Front de salut national (FSN), principale coalition de l’opposition dont fait partie Ennahda. Les manifestants y ont précisément réclamé la libération de figures de l’opposition. Munis cette fois de masques à l’effigie de celles-ci, les participants au deuxième rassemblement dans l’après-midi étaient venus à l’appel du Réseau tunisien des droits et libertés qui agrège des partis et des ONG sociétalement progressistes.
Au-delà des divergences strictement idéologiques, si ces derniers ne souhaitent pas manifester aux côtés des conservateurs d’Ennahdha, c’est qu’ils considèrent que ce parti est l’un des responsables de la situation d’impasse politique qui a conduit au coup de force du président Kais Saïed en juillet 2021.
Gap générationnel
Plus jeunes, mais aussi plus virulents dans leurs slogans dont certains trouvent leur inspiration clairement dans l’extrême gauche « wokiste », certains de ces manifestants n’étaient pas encore adolescents au moment des évènements de la révolution. Ils méprisent des figures telles que Ahmed Néjib Chebbi qu’ils connaissent peu mais à qui ils reprochent son ralliement au FSN.
Des manifestants qui étaient fiers en outre du soutien de Mohamed Amine Hamzaoui, rappeur et acteur dont le film est actuellement à l’affiche dans les cinémas tunisiens, présent à la seconde manifestation. « Non à une justice aux ordres ! », « Fidèles au sang des martyrs » de la révolution, ont scandé les protestataires, encadrés par un important dispositif policier.
En vertu d’un décret présidentiel, Kais Saïed avait supprimé le jour férié du 14 janvier, à la faveur du 17 décembre, jour où le vendeur ambulant Mohamed Bouazizi s’était immolé par le feu, il y a un peu plus de quatorze ans, pour protester contre la saisie de sa marchandise par la police. Un narratif qui suggère que le 14 janvier fut la date non pas de la consécration de la révolution mais de sa confiscation par des élites hostiles au « peuple ».