Tunisie. Des signaux macroéconomiques en demi-teinte
La croissance devrait ralentir davantage pour s’établir à 2% en Tunisie durant l’année 2023, avant de repartir légèrement à la hausse 2,3% en 2024. C’est du moins ce qui ressort du dernier rapport sur les perspectives économiques régionales pour la partie méridionale et orientale du bassin méditerranéen, publié aujourd’hui mardi 26 mai par la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD).
S’ils ne sont pas à proprement parler en berne, ces chiffres restent préoccupants, surtout en l’absence de finalisation d’un accord avec le Fonds monétaire international. Manque de visibilité, instabilité politique, ralentissement économique en Europe, ressources budgétaires limitées, manque d’accès aux financements extérieurs, environnement économique contraignant et retards dans la mise en œuvre des réformes requises par le FMI… Autant d’éléments qui continueront sans doute à peser sur l’économie tunisienne, selon la même source.
Par ailleurs l’économie tunisienne demeure exposée aux chocs extérieurs en raison de sa dépendance relativement élevée au tourisme (la récente attaque du site de la Ghriba affecte déjà la saison), aux importations de denrées alimentaires et d’énergie, ainsi qu’à l’Europe en tant que marché d’exportation. Or, si un accord définitif portant sur un programme financé par le FMI était atteint, il pourrait débloquer les financements extérieurs nécessaires et accélérer les réformes, dont la levée progressive des subventions au carburant, la réduction de la masse salariale du secteur public, la diminution du déficit budgétaire et des améliorations du climat des affaires via moins de bureaucratie.
Reste que le taux de chômage en Tunisie a augmenté au cours du premier trimestre 2023 pour atteindre 16,1%, contre 15,2% au cours du quatrième trimestre 2022, selon des données publiées hier lundi par l’Institut national de la statistique.
Relativisation des données à l’aune du contexte régional
La BERD prévoit en outre une croissance économique timide en 2023 dans la partie méridionale et orientale du bassin méditerranéen (région SEMED). La Banque s’attend à une légère reprise de la croissance du PIB à 3,6% en 2023, contre 3,1% en 2022, alors que les économies de la région SEMED s’adaptent aux conséquences de la guerre contre l’Ukraine, que le secteur agricole reprend de la vigueur et que les réformes avancent.
Cependant, les perspectives d’évolution de l’inflation à l’échelle mondiale et l’incertitude politique rendent la situation difficile et restent des risques de détérioration. La reprise devrait accélérer en 2024 avec une croissance moyenne du PIB supérieure à 4%, en même temps que les réformes progressent dans tous les pays de la région.
A titre de comparaison, la croissance en Egypte a elle aussi ralenti pour atteindre les 4,2% entre juillet et décembre 2022 (d’une année à l’autre), contre 9% à la même période l’année précédente (juillet-décembre 2021). Ce ralentissement découle d’une contraction dans les secteurs des industries manufacturières et de la construction, qui ont été touchés par le manque de devises étrangères, ainsi que des incidences de la guerre contre l’Ukraine sur le canal de Suez et sur les recettes du secteur du tourisme.
Mais la livre égyptienne a surtout perdu plus de 50% de sa valeur face au dollar américain entre mars 2022 et avril 2023, dans un contexte de vulnérabilités extérieures exacerbées et en raison de la décision par la Banque centrale égyptienne de passer à un régime de taux de change flexible.
Quant à la croissance du PIB marocain, elle devrait atteindre 3,1% en 2023 grâce à une reprise notable du secteur agricole mais aussi au ralentissement de l’inflation, ainsi qu’au retrait du pays de la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI), ce qui redonne confiance aux investisseurs. Ce n’est qu’en 2024 que les estimations prévoient que la croissance retrouve ses niveaux d’avant la pandémie, soit 3,2%.