Tunisie. Des dizaines de familles d’opposants politiques manifestent à Tunis

 Tunisie. Des dizaines de familles d’opposants politiques manifestent à Tunis

« La détention forcée est un crime d’Etat » ont brandi les manifestants

Depuis le coup de force du président Kaïs Saïed, les autorités ont arrêté une soixantaine de personnalités dont une vingtaine d’opposants politiques. A deux mois et demi du prochain scrutin présidentiel, leurs proches réclament leur libération.

25 juillet 2024, jour de commémoration du 67e anniversaire de la République tunisienne, mais qui coïncide depuis 2021 avec le coup de force constitutionnel de Saïed, une centaine de proches d’opposants au président de la République, emprisonnés pour certains depuis près d’un an et demi, ont manifesté jeudi pour réclamer leur libération.

Arborant des T-shirts avec des photos des détenus ou encore tenant des couffins en plastique servant à leur apporter de la nourriture en prison, les familles ont défilé dans le centre de Tunis, Avenue Habib Bourguiba, scandant des slogans hostiles au président Saïed, auteur il y a trois ans, jour pour jour, d’une entourloupe juridique par laquel il s’est octroyé les pleins pouvoirs.

Depuis février 2023, les autorités ont pour rappel arrêté une vingtaine d’opposants politiques mais aussi  des personnalités parmi lesquelles des hommes d’affaires, accusés de « complot contre la sûreté de l’État » et qualifiés de « terroristes » par Kaïs Saïed, candidat à sa réélection en octobre. Des ONG dont Amnesty International ont dénoncé des accusations fleuves et « une chasse aux sorcières motivée par des considérations politiques ».

 

Une union taxée de « faux-semblant » politicien

Parmi eux, figurent des dirigeants du parti Ennahdha qui a dominé la vie politique de 2011 à 2021, du Front de salut national, principale coalition d’opposants, ainsi que de mouvements de gauche. Cette sorte d’union sacrée de diverses familles idéologiques est régulièrement raillée par les discours de Kais Saïed comme étant hypocrite et politicienne. Or, la mobilisation de jeudi « pour exiger la libération de tous les détenus a été entièrement organisée par les familles, c’est notre affaire et notre priorité », a indiqué Mouna Ibrahim, épouse d’Abdelhamid Jelassi, un ancien cadre d’Ennahdha.

« Le 25 juillet est la fête de la République. Normalement dans une République, tous les citoyens sont censés jouir de leurs droits et libertés. Aujourd’hui, des citoyens tunisiens sont injustement en prison », a-t-elle fustigé. En octobre 2023, une autre figure de l’opposition, Abir Moussi, cheffe du Parti destourien libre (PDL), nostalgique de l’ancien régime a à son tour été emprisonnée. Ses partisans entendent « déposer sa candidature bien qu’incomplète ».

Prenant part à la marche qui s’est regroupée devant le théâtre municipal, Faiza Rahem, l’épouse d’Issam Chebbi, secrétaire général du parti social-démocrate Al Joumhouri, lui aussi détenu depuis le printemps 2023, a quant à elle dénoncé « les lois contraignantes sur-mesure, mises en place à dessein » en vue de l’élection présidentielle du 6 octobre pour laquelle Chebbi était le candidat désigné de son parti. « La candidature n’est pas passée car il faut une procuration signée de l’intérieur de la prison. Alors que selon la loi, un parti a le droit de désigner le candidat qu’il veut », a-t-elle regretté.

Seif Soudani