Coup d’envoi d’une campagne électorale sous haute tension
Si elle a commencé dès la fin de la semaine dernière à destination des Tunisiens résidents à l’étranger, c’est aujourd’hui lundi 2 septembre que la campagne électorale pour la présidentielle anticipée est autorisée à démarrer sur le plan national par l’ISIE. Une campagne courte, de 12 jours seulement, qui promet d’être particulièrement disputée en région.
Mais depuis ce matin lundi, la première ombre au tableau est sécuritaire : la fête électorale fut en effet gâchée, endeuillée par un échange de coups de feu dans la région de Hidra, gouvernorat de Kasserine, frontalier avec l’Algérie, qui a coûté la vie à un officier de la Garde nationale.
« Opération préventive »
Bilan : trois terroristes, dont deux éléments algériens qualifiés de « très dangereux », activement recherchés, ont été abattus. Au cours de la même fusillade, le chef du poste de la Garde nationale de Hidra a été tué, selon le porte-parole de la Garde nationale, Houssemeddine Jebabli.
A l’heure qu’il est, les opérations de ratissage du terrain près de la localité d’Om Dhfa ont empêché ce groupe armé de rejoindre les hauteurs de la région en passant par les montagnes du Kef.
Région sinistrée par le chômage, le gouvernorat de Kasserine est l’un des enjeux de campagne, l'une des premières destinations d’un périple de 24 déplacements du candidat Youssef Chahed le 5 septembre prochain. Manches retroussés, le chef du gouvernement aux pouvoirs suspendus le temps de la campagne est apparu aujourd’hui lors de son meeting inaugural à Tunis dans un format qui se veut dynamique, improvisant pendant près d’une heure un discours de programme qu’il a entamé par un hommage rendu à l’officier martyr.
D’autres candidats ont d’ores et déjà choisi le centre et le sud du pays comme première étape de campagne, à l’image de Saïd Aïdi qui a opté pour Tataouine, et Mohamed Abbou et Néji Jalloul qui ont tous deux jeté leur dévolu sur la ville de Kairouan.
Des régions défavorisées, laissées pour compte de la croissance, dans lesquelles le magnat des médias et du caritatif Nabil Karoui a sans doute pu se constituer une avance confortable, lui qui se présente désormais depuis sa cellule de prison, sa candidature ayant été retenue dans le bulletin de vote définitif révélé par l’ISIE le 31 août, aussi surréaliste que soit cette situation…
Du grabuge à l’ISIE
Autre élément venu perturber le bon déroulement de cette phase électorale sensible, la décision surprise prise par les membres de l’Instance supérieure indépendante pour les élections de geler le poste de porte-parole officiel de l’Instance, sans plus de précisions sur les motifs de cette mesure visiblement punitive, intervenue selon nos sources en marge d’un Conseil tenu en urgence, en l’absence de l’intéressée, Hasna Ben Slimane, qui avait été nommée à ce poste le 13 février 2019.
Le réseau d’ONG Morakiboun a à cet égard exprimé son étonnement, estimant dans une déclaration rendue publique lundi que cette décision est « inopportune puisqu’en l’absence d’un porte-parole, l’ISIE risque de se trouver face au problème de la profusion de déclarations contradictoires données par les membres du conseil de l’Instance », tous habilités à s’exprimer au nom de l’Instance.
Au nom du droit à l’accès à l’information, le réseau pour l’observation des élections a ainsi appelé l’ISIE à publier le PV des délibérations du conseil qui précise les raisons du gel de ce poste, ainsi que les résultats du vote à ce propos, conformément à l’article 18 de la loi organique n°2012/23.
Un cafouillage qui ne rassure pas sur la communication et la transparence au sein de l’Instance en charge des élections, d’autant plus que la membre suspendue dans cette tâche était une vis-à-vis généralement appréciée des journalistes.
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