Arrestation de Borhène Bessaies, « matière grise de Nidaa Tounes »

 Arrestation de Borhène Bessaies, « matière grise de Nidaa Tounes »

En 2011


La chambre criminelle de la Cour d’appel de Tunis venait de confirmer hier mardi le jugement rendu par le Tribunal de première instance condamnant Borhène Bessaies à deux ans de prison ferme pour abus de pouvoir dans une affaire d’emplois fictifs.


Ses soutiens, nombreux sur les réseaux sociaux pour une figure aussi controversée, dénoncent « un acharnement judiciaire et politique », tandis que ses détracteurs, dont l’ONG de vigilance I-Watch, filiale de Transparency International, se félicitent d’avoir été parmi les premiers à ébruiter le scandale dit de l’entreprise Sotetel impliquant celui qu’ils qualifient d’ « architecte du système médiatique de l’ancien régime ».


Etant une figure publique, c’est le porte-parole du ministère de l’Intérieur qui a confirmé dans la soirée les détails de l’arrestation particulièrement rapide, quelques heures seulement après l’énoncé du verdict. Ainsi c’est une patrouille d’un checkpoint de la police au niveau de la station Tunis marine qui a arrêté le cadre de Nidaa Tounes Borhane Bessaies qui se dirigeait vers la Goulette, et ce après que trois avis de recherche aient été émis à son encontre. Le site Business News évoque pour sa part « une délation » qui pourrait être derrière cette arrestation éclair.


Bessaies écope aussi d’une amende de près de 200 mille dinars pour avoir « agréé, sans droit, des avantages en sa qualité de fonctionnaire public ». 198 mille dinars, c’est le montant du salaore annuel dont l’homme a reconnu avoir bénéficié via Sotetel, acronyme de Société tunisienne d’entreprises de télécommunications, une filiale de la compagnie tunisienne Tunisie Télécom, à l’époque où il était un propagandiste célèbre du régime de Ben Ali.


 


Myriade de réactions


Les réactions pleuvent depuis ce mini séisme qui agite la scène politique tunisienne.

Le député de Nidaa Tounes Abdelaziz Kotti « Bsaies est condamné, mais les coupables sont parmi nous ! ». D’autres pointent du doigt « le deux poids, deux mesures » s’agissant des crimes et délits liés à la corruption de l’ère pré révolution, dont certains ont pu bénéficier de la loi d’amnistie administrative, quoique la loi stipulait que les fonctionnaires ayant directement bénéficié de malversations à titre personnel étaient exclus de ladite amnistie.


D’autres encore notent que le tribunal avait mis fin aux poursuites à l’encontre des autres accusés dans cette affaire : Hedi Frioui, Mohamed Hedi Dridi et Montassar Ouali, ancien ministre des télécommunications de Ben Ali. En 2013, dans le cadre de la même affaire, l’ancien ministre de la Communication et ex-directeur de la défunte ATCE, Oussama Romdhani, ainsi que Adel Gaâloul, ancien secrétaire d’état et d’autres responsables avaient tous été libérés.


Autant d’éléments qui font craindre aux soutiens de Bsaies, dont son épouse la journaliste Saloua ben Noomane, « une dérive autoritaire » et une « justice sélective et aux ordres ». C’est que depuis qu’il avait quitté les plateaux TV où il a animé plusieurs talk-shows politiques sur Nessma TV puis Attassia TV, l’homme devenu conseiller proche de Hafedh Caïd Essbsi avait été chargé d’impulser une nouvelle ligne politique au parti Nidaa Tounes alors en perte de vitesse en 2017.


Mais concrètement, Bsaies se trouvait en première ligne des attaques anti Youssef Chahed, au sujet duquel il concentrait récemment ses reproches de mauvaise gouvernance.


 


A Nidaa Tounes, la spirale des démissions se poursuit


La descente aux enfers continue pour le parti présidentiel, puisque l’on apprend aujourd’hui mercredi, dans la foulée de l’arrestation de Bsaies, une énième démission collective.


Cette fois ce sont les députés Samah Bouhaouel, Lotfi Nabli, Mohamed Saïdane et surtout Héla Omrane, l’une des égéries charismatiques du parti, qui annoncent leur départ du bloc Nidaa Tounes à l’Assemblée. 


Motif invoqué, « les méthodes de gestion unilatérales de Sofiène Toubel », un autre proche de Hafedh Caïd Essebsi, qui a selon les démissionnaires affaibli l’efficience de leur groupe parlementaire.


 


Seif Soudani