7 ans après l’assassinat de Chokri Belaïd, le procès piétine
La veille de la commémoration du 7ème tragique anniversaire de l’assassinat du leader d’extrême gauche, le comité de défense des martyrs Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi a organisé en ce mercredi 5 février 2020 une conférence de presse pour prendre à témoin l’opinion publique à propos des derniers développements dans l’affaire des deux assassinats politiques. Un dossier encore loin d’être complètement élucidé.
L'avocat Abdenaceur Laouini a accusé l'autorité judiciaire de recourir à "une politique de dissémination de l'affaire en de multiples dossiers de sorte de les noyer"
Entamant son propos sur une note plutôt positive, le comité de défense a tenu à saluer le fait qu’après six années de militance judiciaire, la Cour de cassation lui avait « rendu justice » en 2019 s’agissant de onze points et autant de manquements que le comité avait relevés. La Cour avait en effet accepté de réexaminer l’affaire, mais cette fois en impliquant 16 individus parmi les 26 que les avocats de la défense avaient présenté comme suspects : des proches, membres et responsables du parti Ennahdha, ainsi que des complicités présumées parmi d’anciens membres des forces de l’ordre.
Ghannouchi bénéficiaire d’un traitement de faveur ?
Néanmoins le comité déplore aujourd’hui que le fait que le parquet, bien que « contraint d’ouvrir une enquête » aurait selon la même source « redoublé d’efforts en vue de prémunir le chef d’Ennahdha, Rached Ghannouchi, de toute poursuite judiciaire ». Ainsi le ministère public n’a à ce jour formulé aucune accusation précise à son encontre, regrette le comité, et ce en dépit des accusations qui ont été adressées à l’encontre de Taher Boubahri et Ridha Barouni, deux « lieutenants » considérés comme proches de Ghannouchi, actuel président du Parlement.
Plus problématique encore, le comité de défense a également dénoncé le fait que le ministère public ait rejeté le caractère terroriste de l’affaire, considérant ce dossier comme étant une simple affaire de droit commun.
« Une plaie encore béante »
L'assassinat politique est généralement défini comme étant l’élimination ciblée d’une personnalité politique, un concept politique remontant à l'Antiquité. Cette façon de se débarrasser d'un adversaire politique se distingue de l'exécution par son caractère extrajudiciaire. Se distinguant d'un meurtre ordinaire par les enjeux de pouvoir ou idéologiques qui le caractérisent, l’assassinat politique reste parmi les crimes les plus difficilement élucidables, du fait des moyens étatiques souvent employés dans son exécution.
Belaïd fut assassiné par balles le 6 février 2013 alors qu'il sortait en voiture de son domicile du quartier d'El Menzah VI. 1 an plus tard, l’assaillant, identifié comme étant Kamel Gadhgadhi, est tué à Raoued lors d’une opération commando. Depuis, la classe politique tunisienne peine à trouver une catharsis autour de cet épisode fondateur et structurant de la vie politique post révolution.