Affaire Jarraya : le casse-tête judiciaire continue
Le collectif de défense de l’ancien ambassadeur de Tunisie au Maroc et ministre de l’Intérieur Najem Gharsalli a indiqué que la Cour de cassation de Tunis a rejeté hier jeudi les décisions émises par la chambre d’accusation près la Cour d’appel de Tunis, relative à l’affaire dite Jarraya de complot contre la sûreté de l’Etat. Vers une résolution de cette affaire d’Etat emblématique du mandat Youssef Chahed ?
La Cour de cassation examinait le 23 août la décision de la chambre d’accusation près la Cour d’appel de Tunis relative à la comparution des intéressés devant la chambre criminelle militaire, consécutivement à un pourvoi en cassation formé par le collectif de défense des quatre accusés dans cette affaire.
La chambre d’accusation près la Cour d’appel de Tunis avait pour rappel décidé de transférer les accusés dans cette affaire, l’homme d’affaires Chafik Jarraya, l’ancien ministre de l’Intérieur de 2015 à 2016 Najem Gharsalli, et les deux hauts officiers de police Imed Achour et Sabeur Laajili devant les chambres criminelle et pénale du Tribunal militaire permanent de Tunis.
La décision d’hier de la cour de Cassation de Tunis a d’ores et déjà été interprétée par certains juristes comme un retrait de l’affaire de « haute trahison des mains de la justice militaire, la Cour de cassation ayant considéré que l’affaire n’est pas de ses compétences. Ce qui laisse supposer qu’il n’y aurait pas, a priori, de haute trahison dans le dossier. C’est le Pôle judiciaire antiterroriste qui devrait donc hériter du dossier.
La défense avait par ailleurs mis en doute la compétence d'une magistrate de la cour d'appel, pour avoir siégé précédemment dans le même dossier au sein de la chambre d'accusation.
Une affaire d’Etat complexe où l’exécutif est en difficulté
Dans une déclaration au Courrier de l’Atlas, l’avocat de la défense Me Saber Bouattay a précisé que la Cour de cassation a décidé de renvoyer le dossier de l’affaire devant la chambre d’accusation militaire près la Cour d’appel de Tunis pour réexaminer le dossier. Ce qui constitue un désaveu pour la justice militaire.
Le juriste a en outre relevé que la Cour de cassation a également rejeté la décision de la chambre d’accusation relative au refus de la demande de remise en liberté du cadre sécuritaire Imed Achour, ce qui pourrait conduire à sa libération dans les tous prochains jours.
Chafik Jarraya avait été arrêté, le 24 mai 2017, au cours d’une dite de la « guerre contre la corruption », la contrebande et l’implication dans des réseaux de l’économie parallèle, mais n’est en l’occurrence accusé que de malversations et d’« intelligence avec une armée étrangère » (Libye).
Des décisions d’assignation à résidence ont été prises à son encontre sur la base « d’informations prouvant leur implication dans des infractions susceptibles de menacer dangereusement la sécurité et l’ordre public », selon le ministère de l’Intérieur.
Dans le cadre de la même affaire, un mandat d’amener a été émis à l’encontre de l’ancien ministre de l’Intérieur et diplomate Najem Gharsalli, alors en poste à Rabat. Celui-ci avait d’abord entendu en tant que témoin en sa qualité d’ancien ministre de l’Intérieur dans cette affaire dans laquelle sont aussi accusés des cadres sécuritaires dont Saber Laajili, ancien directeur général de l’Unité nationale d’investigation dans les crimes terroristes d’El Gorjani, et Imed Achour ancien directeur général des Services spécialisés du ministère de l’Intérieur.
S’il est avéré que ces derniers ont bien reçu l’homme d’affaires et lobbyiste Jarraya dans leurs bureaux dans les locaux du ministère de l’Intérieur, en en avisant leur hiérarchie de l’époque, leur défense plaide une attitude inquisitrice du parquet, sous les ordres présumés de la Kasbah, pour « monter en épingle la rencontre » en vue d’un « procès politique » aussi spectaculaire que disproportionné.
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