Tunisie. Affaire Bssais / Zeghidi : des dossiers judiciaires alourdis
La justice tunisienne enfonce le clou dans l’affaire des deux célèbres journalistes Borhen Bssais et Mourad Zeghidi qui avaient respectivement écopé d’un an de prison ferme en première instance pour atteinte à l’ordre public et attribution de faits non réels à un fonctionnaire public. L’opposition et de nombreuses ONG fustigent un acharnement du pouvoir destiné à intimider le secteur de la presse.
Leurs avocats n’ont pas encore fait appel de ce verdict que leurs clients sont rattrapés par de nouvelles affaires qui viennent alourdir considérablement des sentences déjà sévères, mais cette fois sans rapport avec le controversé décret 54 en lien avec la propagation de fausses nouvelles.
Ainsi le porte-parole du Tribunal de première instance de Tunis, Mohamed Zitouna, affirmait hier 27 mai que le Parquet a autorisé l’ouverture d’une enquête judiciaire sur la base « de sérieuses informations » concernant l’implication de Mourad Zeghidi et Borhen Bssais dans des infractions financières.
Saisie du Pôle économique et financier
Zitouna a précisé une déclaration aux médias nationaux que des soupçons d’enrichissement personnel illicite pèsent sur les deux hommes et que l’instruction en cours de fait en vertu de la loi relative au blanchiment d’argent.
Il a assuré que cela se serait déroulé dans le cadre de leur travail dans des radios et des chaînes de télévision. Mohamed Zitouna a ajouté que ces infractions sont en lien avec leurs sources de financement, leur placement et leur gestion, affirmant qu’il existait de sérieux soupçons d’enrichissement illicite et de détention illégale d’actions et de parts dans plusieurs sociétés.
Le porte-parole du Tribunal de première instance a enfin indiqué que la brigade de lutte contre les crimes financiers complexes d’al Gorjani a été chargée de l’enquête et autorisée à « mener les expertises techniques, financières et fiscales nécessaires ».
Les journalistes et animateurs Mourad Zeghidi et Borhen Bssais avaient écopé pour rappel d’un an de prison chacun conformément au décrié décret 54, un texte légiférant sur la diffamation et de la diffusion de fausses nouvelles, et dont l’amendement a été récemment ajourné au Parlement.
Lundi, lors d’un sit-in devant le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), des dizaines de confrères ont brandi « J’assume », un terme prononcé par Mourad Zeghidi devant le juge, devenu depuis symboliquement emblématique d’un mouvement de protestation contre le musèlement de la liberté d’expression dans le pays.
« 1 an de prison n’était pas suffisant », « il s’agit de s’assurer qu’ils ne sortiront plus de prison avant longtemps », ou encore « c’était prévisible, on réactive a posteriori des dossiers dormants à la demande… », ont réagi des internautes incrédules à propos de la volonté manifeste de sortir du cadre polémique de l’inculpation en vertu du seul décret-loi 54.