Tunisie. Actualité judiciaire chargée pour l’opposition
En concomitance avec les nouvelles affaires pour lesquelles est poursuivi le chef d’Ennahdha Rached Ghannouchi, d’autres figures majeures de l’opposition étaient aux prises ces dernières 24 heures avec la justice tunisienne, à quelques semaines des vacances judiciaires prévues entre le 15 juillet et le 15 septembre.
Loin de se tasser à l’approche du scrutin présidentiel qui requiert pourtant un climat démocratique apaisé, la judiciarisation de la vie politique du pays bat son plein. Une situation qui a conduit des expertes du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme à publier le 31 mai dernier un communiqué conjoint indiquant que la détention violente et l’arrestation des avocats Sonia Dahmani et Mehdi Zagrouba « sont des violations inacceptables des droits fondamentaux auxquelles il faut mettre fin ».
Deux nouvelles affaires judiciaires pour Moussi
Avocat et membre du comité de défense de la présidente du Parti Destourien Libre (PDL) Abir Moussi, Ali Bejaoui a ainsi indiqué aujourd’hui que le mandat de dépôt visant celle-ci n’était plus applicable et qu’elle faisait actuellement l’objet d’une « détention arbitraire ». Le juriste a surtout révélé que Moussi faisait face à deux nouvelles enquêtes, ce qui porte le total des dossiers la visant à cinq.
S’exprimant durant une conférence de presse du 6 juin 2024, Bejaoui a affirmé que cinq mois après l’émission du mandat de dépôt, personne n’a été auditionné dans le cadre de l’affaire du bureau d’ordre de la présidence de la République à qui elle réclamait une décharge. L’avocat a dénoncé le « non-respect des procédures et de la loi ayant pour unique but d’empêcher la présidente du PDL de candidater à la présidentielle prévue d’ici la fin de l’année 2024 ».
« Nous tenons à vous informer qu’une association a porté plainte contre Abir Moussi. Elle sera auditionnée le 10 juin. Le bureau d’instruction n°20 prévoit d’auditionner également Abir Moussi dans un autre dossier la même journée. L’objectif de cette avalanche d’affaires judiciaires est d’empêcher Abir Moussi de se présenter aux élections à tout prix », a-t-il fustigé.
Refus net pour Mouakhar
De son côté la chambre des mises en accusation spécialisée dans les affaires de corruption financière près la Cour d’appel de Tunis a décidé de déférer l’ancien ministre de l’Environnement Riadh Mouakher ainsi qu’un cadre de la Protection civile rattaché au ministère de l’Environnement devant la chambre judiciaire spécialisée dans les affaires de corruption financière près le Tribunal de première instance de Tunis. Toutefois les demandes de libération des deux accusés ont été rejetées par le juge en charge du dossier.
Pour rappel, le juge d’instruction près du Pôle économique et financier avait émis dès le 9 mars 2023 un mandat de dépôt à l’encontre de Mouakher. Il est poursuivi dans une affaire d’octroi d’un marché public, en vertu de l’article 96 du Code pénal, pour avoir usé de sa qualité de fonctionnaire et de s’être procuré « à lui-même ou à un tiers un avantage injustifié ». Il est en détention depuis le 28 février 2023.
Report pour Chaima Issa
Le comité de défense de la militante et activiste politique Chaima Issa a enfin annoncé que la chambre pénale de la cour d’appel militaire de Tunis a décidé de reporter sa comparution au 4 juillet 2024. L’opposante du Front du salut avait indiqué le 8 mai avoir été condamnée par contumace par la chambre pénale de la cour d’appel militaire de Tunis à une peine d’un an de prison ferme. Cependant l’intéressée est parvenue à déposer un recours, et la séance avait été fixée au 6 juin.
Dans le détail, la militante politique a été condamnée par la chambre pénale du tribunal militaire permanent à un an de prison avec sursis : six mois de prison pour incitation des militaires à désobéir aux ordres, quatre mois pour offense au chef de l’État et deux mois pour « propagation de fausses informations et de rumeurs dans le but de nuire à la sécurité publique et à la défense nationale ».
Fait rare, la juridiction militaire avait décidé de maintenir sa condamnation en première instance tout en alourdissant la peine corporelle d’un an de prison avec sursis en un an de prison ferme.
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