Accueil d’investisseurs étrangers dans un contexte économique incertain

 Accueil d’investisseurs étrangers dans un contexte économique incertain

Tunisia 2020 – « Conférence Internationale d’appui au développement économique


La Tunisie accueille son premier grand rendez-vous avec les investisseurs étrangers ces 29 et 30 novembre. Ce sera un test. Petit tour d’horizon et analyse.


Cela s’appelle « la Conférence Internationale d’appui au développement économique, social et durable de la Tunisie ». Sur le site dédié, on se contente de TUNISIA 2020 et c’est bien mieux.


Sur le papier, le programme est bien fait. Il est pertinent et la plupart des thèmes choisis sonnent juste: Gestion de l’eau, agriculture et agro-industrie, électricité et énergies renouvelables, santé et industrie pharmaceutique (opportunités régionales évidentes), textile (quelle stratégie de relance?), automobile et aéronautique (la Tunisie, pôle de compétitivité), éducation et économie du savoir, quelle nouvelle offre touristique ?, et enfin la Tunisie hub régional en matière d’économie numérique.


Le programme prévoit également 2 journées de B2B et espère 1.000 participants de 70 pays.


Au lieu de faire des road show, la Tunisie invite les investisseurs potentiels à venir voir de visu. Pourquoi pas ?


Le gouvernement et la présidence (BCE s’est impliqué personnellement et ouvrira la conférence) ont multiplié les efforts. Les déclarations d’avant conférence montrent toutefois chez les responsables tunisiens une certaine naïveté :


– Le redressement des finances publiques n’est pas correctement placé sur les rails.


– La stabilité politique et sociale n’est pas encore assez forte.


– La sécurité suscite toujours des interrogations, la Tunisie est toujours considérée comme un pays à risque par les grandes puissances économiques.


– La politique économique ne fournit pas encore suffisamment de visibilité quant à l’avenir.


– Les troubles sociaux, les grèves ainsi que le risque sécuritaire ne rassurent pas les investisseurs.


Cela étant dit, le pays recèle des opportunités réelles, même dans sa situation actuelle. On pense notamment à l’économie numérique, à l’éducation, à la santé et l’industrie pharmaceutique et à l’agriculture.


Des équilibres macro-économiques profondément affectés


La situation macro-économique est préoccupante: déficits jumeaux, envol de l’endettement, dérapage budgétaire en 2016…. La mission du FMI venue fin octobre est repartie en dressant diplomatiquement un constat d’échec, mais sans rompre les discussions.


Le tableau n’est pas très rose et pour tout dire, il est préoccupant.


La monnaie subit des pressions très fortes vers de nouveaux glissements. Le déficit courant a en effet atteint 9% (8,3% étaient prévus), probablement un record dans l’histoire de la Tunisie moderne. Les recettes du tourisme, comme on le sait, sont en berne, en raison des attentats terroristes passés (Sousse et Le Bardo, Avenue Mohammed V à Tunis). Le gouvernement de la troïka a laissé un pays exsangue.  Le déficit commercial s’est également aggravé.


Le déficit budgétaire sera de 5,7% ce qui ne pourra se rattraper que sur plusieurs exercices. Il faut savoir qu’un déficit budgétaire soutenable est généralement de 3% du PIB. Moins si l’on veut réduire l’endettement.


L’endettement a atteint 63% et continuera immanquablement à progresser. A ce rythme, la Tunisie va se retrouver en défaut de paiement à l’égard de ses créanciers étrangers.


Dès lors, il ne faut pas s‘étonner que le taux de croissance de 2016 se limitera à 1,5% contre 2,2% espérés. Le pays se retrouve dans une spirale négative dont ne peut la sortir qu’une direction volontaire qui maintiendra le cap coûte que coûte. Sinon, sans croissance, et avec l’endettement, comment créer des emplois alors que le pays recèle 630.000 chômeurs ?


Hella Lahbib