A Monastir, le retour des portraits géants fait polémique
En ce jour de commémoration du décès de l’ancien président Habib Bourguiba, le culte voué au « combattant suprême », qui grandit d’année en année depuis le début du mandat de Béji Caïd Essebsi, semble atteindre son paroxysme. A Monastir, fief natal du « despote éclairé », la pratique que l’on croyait révolue des portraits géants est en effet réapparue, célébrant non pas seulement Bourguiba mais l’actuel président de la République Béji Caïd Essebsi.
Réinstaurée par Essebsi, la visite du 6 avril au mausolée de Bourguiba à Monastir est cette année marquée par une nouveauté, ou plutôt un vestige. A l’initiative du gouverneur, des portraits géants du défunt président à vie, mais aussi des portraits de Béji Caïd Essebsi ont été accrochées aux façades et sur les côtés d’immeubles d’habitation sur le parcours de la visite. Les internautes avaient dans un premier temps cru à une initiative des habitants du complexe résidentiel concerné. Mais Mosaïque FM a confirmé dans la journée qu’il s’agit bien d’une initiative des autorités locales.
Celles-ci ont également fait en sorte que la visite du président Essebsi coïncide avec l’inauguration d’une nouvelle station de train, parmi d’autres nouveaux édifices tels qu’une Maison de l’avocat baptisée du nom d’Habib Bourguiba, tous inaugurés par Essebsi via une plaque en marbre à son nom.
Plus insolite, une amicale des anciens de la faculté de médecine dentaire a réalisé un flyer de sensibilisation à l’hygiène buccale et dentaire à l’effigie du sourire de Bourguiba « un leader qui croyait en l’importance de la santé dentaire ».
Plus tard dans la journée, le président Essebsi s’est rendu à Radio Monastir où il fut interviewé par l’homme de théâtre bourguibiste Raja Farhat. « Ceux qui tentent de salir la mémoire de Bourguiba finiront dans la poubelle de l’Histoire ! », s’est exclamé le président dans une formule ordurière manifestement adressée à l’Instance Vérité et Dignité.
Le 24 mars dernier, l’IVD avait consacré une séance d’audition publique consacrée aux victimes de la période de l’indépendance où des partisans de Salah Ben Youssef, rival d’Habib Bourguiba, avaient apporté un nouvel éclairage historique sur une période encore relativement méconnue de l’opinion publique.
Seif Soudani